lundi 18 juin 2007

Correspondance entre les communistes internationalistes de Montréal et le Feu aux poudres

Nous publions certains des échanges que nous avons eus avec un collectif aujourd’hui disparu: Le feu aux poudres.

Nos réponses lors de ces échanges sont importantes pour notre classe parce qu’elles répondent à des questions comme le parlementarisme, le syndicalisme, l’internationalisme versus le nationalisme, le frontisme et la question du parti révolutionnaire international à créer. Nous avons aussi abordé le trotskise qu’il est possible de retrouver dans les commentaires de ST sur le CMAQ: http://www.cmaq.net/node/28400

Nous avons constaté au fur et à mesure de nos échanges que nos divergences étaient de plus en plus grandes et irréconciliables.


6/03/2007

Bonjour chers camarades communistes,

J'ai bien aimé votre texte.[ Un cirque de la noirceur et du mensonge : l’Assemblée Nationale. Celui-ci rejoint très bien ma position ainsi que celle du collectif dont je fais partie. Conscientiser les masses n'est pas chose facile, mais je crois que la construction d'un parti prolétarien internationaliste serait un pas dans la bonne direction. Comment

comptez-vous vous y prendre pour construire un tel parti ?

Salutations révolutionnaires,

Camarade Ben, du collectif Le feu aux poudres

7/03/2007

Bonjour camarade,

Merci pour le commentaire sur notre tract. Qu'il soit positif ou négatif, le commentaire critique est toujours le bienvenu car il permet d'ouvrir une discussion entre camarades et éventuellement de se remettre mutuellement en question de façon dialectique.

Ceci dit, nous sommes heureux de rencontrer vos positions politiques à travers ce tract. Par ailleurs, nous aimerions connaître ces positions plus en détails car, avant aujourd'hui, nous ignorions tout de l'existence du Collectif Le Feu Aux Poudre. Il s'agit donc ici véritablement d'un manque à gagner ; alors vous serait-il possible que vous nous parliez un peu de votre groupe?

Maintenant, nous essaierons de répondre à votre question (question complexe qui plus est), celle du regroupement des forces communistes. En premier lieu, il est important de nous situer politiquement. Ce n'est pas chose évidente puisque nous sommes encore en discussion sur plusieurs sujets qui retiennent notre attention, en y incluant celle du regroupement. Notre héritage politique marxiste est celui des fractions de gauche qui se sont dégagés de la Troisième Internationale en menant le combat contre l'opportunisme dans lequel sombrait celle-ci au fur et à mesure que l'isolement de la Russie révolutionnaire grandissait ; et qu'avec cet isolement s'estompaient les perspectives de cette révolution à d'autres pays.

Nous reconnaissons donc aujourd'hui les apports politiques des fractions de gauche, particulièrement celle de la gauche italienne qui produisit "Bilan" dans les années trente; de même que la gauche hollandaise, et française. Nous souhaitons poursuivre leur combat pour la clarté programmatique : internationalisme prolétarien / rejet de toutes formes de nationalisme ; unité de la classe prolétarienne / rejet du frontisme ; incitation à l'organisation autonome du prolétariat dans ses luttes / rejet des syndicats (qu'ils se disent rouges, anarchistes, ou "révolutionnaires") ; dictature des conseils ouvriers ou des organes dont se sera doté notre classe / rejet du légalisme bourgeois et destruction de son État.

La construction d'un parti internationaliste pour notre classe est à l'ordre du jour face à un capitalisme qui patauge dans une crise internationale croissante, et dont la seule perspective pour y remédier est la conflagration mondiale. Par ailleurs, celui-ci ne doit pas se concevoir à la hâte, en laissant de côté la clarté programmatique au profit de gagner plus de "masses". Dans le passé, cette politique s'avéra désastreuse quand, afin "d'aller aux masses", le programme communiste fut liquidé dans une panoplie de politiques étrangères au prolétariat (citons le frontisme pour ne donner qu'un exemple).

La construction d'un parti internationaliste implique l'ouverture d'un débat entre les forces se disant révolutionnaires. Mondialement, le véritable camp prolétarien est très faible de son nombre actuellement, et presque inexistant au Canada. Nous ne pouvons donc, pour l'instant - et suivant notre faiblesse numérique - qu'essayer d'être présent là où le prolétariat affronte son ennemi de classe, en y diffusant son propre programme : le programme communiste, afin de rallier les éléments les plus conscients du prolétariat face à son propre sort et pour que le programme gagne la direction des luttes. Nous devons aussi rencontrer nos "camarades" dans le milieu politique pour les affronter impitoyablement, mais dans la camaraderie, sur le terrain des idées afin d'y sortir et/ou gagner les éléments prolétariens, c'est-à-dire les éléments qui ne sont pas "brouillés" par des politiques bourgeoises ou que nous aurons réussi à "débrouiller" par nos bases politiques claires et principielles.

La construction d'un parti internationaliste prolétarien est à l'ordre du jour, mais une immense tâche nous attend. Souhaitez-vous y contribuer en ouvrant le débat avec nous?

En espérant avoir pu répondre à votre question,

Salutations internationalistes,

Alex pour des communistes internationalistes, Montréal.

8/03/2007

Salut camarade,

Tout d'abord, je tiens à te remercier d'ouvrir une discussion avec nous. Nous sommes un collectif nouvellement formé dans le but de faire de la propagande. En réalité, on est journal pluraliste, de gauche, qui se dit anti-capitaliste et où on a tenté de créer une atmosphère de débat au sein du journal. Au sein du collectif, il y a des anarchistes, communistes (qui se définit plus vers le trostkysme) et socialiste. Personnellement, je trouve que la marge de différence est tellement mince (genre transition de l'État), qu'une division me semble plus ou moins appropprié. En gros, anar et coco souhaite la communisation des moyens de productions. Notre objectif est de promouvoir ces courants d'idées aux non-initiéEs de la question sociale. Dans cet ère de la surconsommation, disons l'esprit critique n'est pas très valorisée dans les médias bourgeois. En résumé, on essaie de véhiculer les idées du socialisme au prolétariat et d'ouvrir un débat sur la question sociale au sein des "masses". C'est en gros notre philosophie.

Comme vous allez le constater, les différents moyens d'arriver à l'éclatement d'une révolution sont toutes prise en considération. En fait, notre prise de position là-dessus est peu clair. Si on se réfère à votre positionnement politique, il y a quelques désaccords:"internationalisme prolétarien / rejet de toutes formes de nationalisme". Évidemment, l'internationalisme prolétarien est un concept qui nous tient à coeur, dans le sens qu'on la vue avec la Russie, le socialisme dans un seul pays ne peut fonctionner. Aussi, la fraternité des peuples est une valeur chère aux socialistes et dans une communisation future, l'entraide internationnale va être une valeur sûre. Par contre, au sein du collectif, il ya une forme de contradiction puisque certains prônent l'Indépendance du Québec, qui est en soit, une forme de nationalisme territoriale (à la FLQ genre). Dans le cadre d'une exploitation fédérale, ou le pouvoir est concentré, le Québec est assujettit par les politiques fédérales. Je tente ici de refléter le mieux que possible la pensée de mes camarades. Puis "unité de la classe prolétarienne / rejet du frontisme ". Naturellement, la solidarité ouvrière nous tient à coeur. Disons qu,avec le journal on tente de créer des liens de solidarité et détruire les préjugés et la pensée réactionnaire qui se trouve au sein de la classe ouvrière. Pour ce qui est du frontisme, je vais t'avouer que je ne sais pas ce que ça veut dire...Donc, je ne peut pas le commenter. Ensuite "incitation à l'organisation autonome du prolétariat dans ses luttes / rejet des syndicats (qu'ils se disent rouges, anarchistes, ou "révolutionnaires")", l'auto-gestion est pour nous aussi crucial. C'est sûr qu'on incite pas la classe ouvrière à le faire (du moins pas encore), parce qu'on a pas les moyens de le faire, sur ce point on va s'entendre. La question syndicale est plus sensible, car pour nous, le syndicalisme de combat est une bonne tactique d'acquérir des gains dans l'immédiat tout en véhiculant les idées communistes. En s'impliquant dans des syndicats, cela évite le phénomène de ghettoisation tout en tentant de véhiculer le discours de la lutte des classes. Aussi, dans l'immédiat, la perte des syndicats serait un désastre pour le prolétariat, car les conditions de travail seraient d'avantage merdique. Je sais bien que vous avez une visée à long terme, mais je pense que certaines structures actuelle qui met pas tout a fait le système en question peut être utile afin de transmettre un certain discours plus radicale...Pour finir "dictature des conseils ouvriers ou des organes dont se sera doté notre classe / rejet du légalisme bourgeois et destruction de son État". Effectivement, cette option nous va à merveille! Le mode de fonctionnement basé sur des conseils ouvriers évitent l'exploitation de l'homme par l'homme en plus de promouvoir la démocratie directe.

Personnellement, je ne suis pas tout à fait Léniniste. Mais certaines idées me plaisent, comme celle de la propagande. Dans un parti, une fois que les forces sont regroupés, le travail de diffusion se fait beaucoup plus facilement et efficacement, qu'un collectif comme nous, qui survit tant bien que mal à diffuser les idées. Avec le surplus du nombre, on est beaucoup plus fort. Par contre, des concepts comme la ligne de parti m'horripile un peu. C'est-à-dire, que parfois, cette fameuse ligne fait en sorte d'abolir toute forme de débat et de contestation(qui pourrait faire valoir certaines tactiques différentes). Je sais que là n'est pas votre intention, car vous avez mentionné la créationd'un parti anti-Stalinien! Je vais t'avouer camarade, que j’ai pas beaucoup d'expérience en la matière, mais qu'un parti tel que le PCR m'a énormément déçu et déplu. Un parti hyper hermétique, où les "dirigeants" faisaient régner un sentiment de peur et que l'information n'était pas entièrement divulgué.(Note 1) Disons que ça nous a donné une mauvaise image d'un parti soi-disant révolutionnaire. Naturellement, faut pas généraliser, et je crois que votre but n'est pas de construire un parti aussi autoritaire...

Le feu aux poudres apporterait son attribution dans un tel objectif. C'est sûr qu'à l'intérieur de nos pages, on a divulguerait l'idée. Je pense qu'un parti, pourrait apporter un grand support pour le prolétariat, entre autre apporter un appuit dans les luttes sociales et la diffusion des idées communistes. Naturellement, un certain "débrouillage" devra être fait au sein du collectif ;), puisqu'on a est pas totalement opposé à des partis comme " Québec solidaire". En résumé, le Feu aux poudres souhaitent dans l'immédiat un virage à gauche et la destruction de l'ère néo-libérale, si ça se peut t'aider à te faire une idée. C'est pour cela, que certaines tactiques nous déplaisent pas (genre le syndicalisme). Bref, j'espère que cela à apporter un éclaircissement sur nous et ce qu'on pense sur la création d'un parti. Je vais t'avouer que votre projet me plaît, mais évidamment, je ne peux pas parler aux noms de mes camarades.

salutation révolutionnaire,

Rémi

13/03/20007

Salutations aux camarades du Feu Aux Poudres,

Avant tout, nous sommes heureux d'avoir reçu une réponse de votre part et de constater que nous sommes déjà en train d'échanger sur certains points. C'est très encourageant pour notre groupe et le milieu dans lequel nous évoluons mutuellement comme une preuve que la discussion avec des camarades de divers horizons politiques est possible de même que souhaitable pour l'ensemble de notre classe.

Aussi, nous tenons à saluer sincèrement le climat de débat qui semble prévaloir au sein de votre collectif. Nous avons d'ailleurs pris connaissance des conditions dans lesquelles vous évoluez, c'est-à-dire la mixité politique qui anime votre journal. Cependant, comme vous le savez sans doute, ce n'est pas une situation que nous préconisons en tant que groupe issu de la Gauche Communiste. Au contraire, nous pensons que ce genre de situation ne peut malheureusement qu'entretenir la confusion dans notre classe. Par ailleurs, votre disposition à débattre à l'intérieur du collectif le Feu Aux Poudres - et à débattre avec d'autres éléments de la classe -permettra éventuellement de pallier à ceci et d'évoluer vers une homogénéisation politique plus souhaitable, si tel est votre objectif. En ce qui nous concerne, nous ne pouvons que vous encourager à persévérer dans cette voie car c'est par le débat au sein de votre collectif que se démarqueront les positions prolétariennes des positions non prolétariennes, les éléments de notre classe des éléments étrangers à notre classe, et enfin que se démarqueront les révolutionnaires de leurs caricatures.

Nous aimerions, si vous le voulez bien, contribuer à entretenir le débat dans votre groupe en maintenant une discussion étroite avec celui-ci dans une atmosphère de camaraderie, malgré les divergences qui pourront peut-être se dresser, pour vous aider à affûter l'arme la plus efficace dont dispose notre classe en temps de reflux contre-révolutionnaire, c'est-à-dire la théorie révolutionnaire, car comme l'a si bien dit Lénine, "sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire".

Maintenant, revenons sur votre réponse. Lorsque vous affirmez que pour le Feu Aux Poudres, "les différents moyens d'arriver à l'éclatement d'une révolution sont toutes prises en considération" et que votre "prise de position là-dessus est peu claire", ça nous ramène un peu à ce qui a été dit plus haut au sujet d'une discussion vers une homogénéisation politique. Pour nous, il n'y a justement pas divers moyens de parvenir à une révolution communiste. En effet, c'est dans la généralisation des luttes dans lesquelles se trouvent impliquées notre classe, et surtout dans leurs transcroissances guidées par le programme de son parti, que le prolétariat prend conscience de ce qui l'oppose et perpétue son exploitation. C'est à ce moment que pour le prolétariat s'effectue un "saut qualitatif" dans la généralisation de ses luttes, lesquelles s'autonomisent alors de plus en plus de la tutelle des vieilles structures bourgeoises (état, syndicats, partis politiques) grâce à une conscience de plus en plus aiguisée par son parti, pour que celles-ci s'orientent enfin vers une guerre générale contre la bourgeoisie. Et c'est le rôle du parti internationaliste prolétarien d'insuffler le programme révolutionnaire au sein des organes dont se dotera le prolétariat lorsque celui-ci imposera sa dictature. C'est aussi son rôle d'analyser les luttes pour bien comprendre où le prolétariat doit pousser afin de rendre son programme impitoyable pour la bourgeoisie, afin qu'aucun recul sur ses positions ne soit possible pour que la bourgeoisie reprenne les rênes du pouvoir et impose à nouveau sa dictature sur le prolétariat.

Dès cet instant, tout légalisme parlementaire, ou organe de médiation quelconque entre la classe et la bourgeoisie, n'est possible. Les soi-disant "partis de gauche" comme Québec Solidaire ne font qu'entretenir l'illusion que la démocratie parlementaire est neutre. En fait, les mécanismes légaux dans lesquels pataugent ces "partis de gauche" empêchent tous changements de se produire réellement. D'une petite réforme acclamée par les "citoyens", de gros reculs pour l'ensemble de l'oeuvre. N'oublions surtout pas que toutes ces réformes, lois, mesures sociales, lorsqu'elles nuisent à la production de profits pour la bourgeoisie, se voient plus souvent qu'autrement modifiées vers la caducité ou carrément abrogées dans le temps (par exemple, lors d'un changement de pouvoir). La voie parlementaire se veut donc complètement étrangère au prolétariat. L'heure en est une, pour le prolétariat, d'instaurer sa propre dictature sur tous les vestiges de la société bourgeoise.

C'est un peu la même chose en ce qui concerne le nationalisme. Lorsque vous écrivez que "dans le cadre d'une exploitation fédérale, où le pouvoir est concentrée , le Québec est assujetti par les politiques fédérales"; en fait, l'exploitation fédérale n'est que l'expression du désaccord en terme politico-économiques entre la bourgeoisie canadienne et la bourgeoisie québécoise. Quel est le véritable gain pour le prolétariat qu'un Québec indépendant pourrait lui apporter si ce n'est de se faire exploiter par un de ses "pairs"? Qui plus est, dans le cadre du capitalisme à son stade impérialiste, l'interdépendance économique entre les différents pays est telle qu'en termes absolus, aucun réel changement ne viendrait modifier la dynamique politique d'un Québec indépendant. Il faut d'ailleurs mentionner que le Québec possède aussi une volonté impérialiste avec ses monopoles québécois comme Bombardier, SNC Lavallin, Québecor, le Cirque du Soleil, Hydro-Québec qui sont actuellement aidés par l’état fédéral et provincial. L'indépendance nationale n'est qu'un leurre de la bourgeoisie afin de polariser plus adéquatement les blocs politiques dans lesquels elle se trouve, et surtout afin de mieux intégrer le prolétariat à ses visées impérialistes dans une possible confrontation mondiale. La "libération nationale" n'affaiblit aucunement le capitalisme puisqu'elle ne remet pas en cause son assise fondamentale que sont les rapports de production.

De même pour le frontisme. Les tactiques de "front unique", front populaire, front antifasciste, ont été une fabuleuse manière pour la bourgeoisie de détourner le prolétariat de sa tâche historique en proposant quelques alliances "temporaires" avec ses propres partis "ouvriers". L'autonomie du prolétariat dans ses luttes - dans sa guerre - est la condition sine qua non de son cheminement vers le renversement de la vieille société bourgeoise et autoritaire. Aucune alliance avec des fractions de la bourgeoisie - qu'elles se disent ouvrières, progressistes, antifascistes - ne doivent se contracter. Tout courant politique avec lequel le prolétariat pourra s'acoquiner momentanément, et qui lui est étranger, ne peut le mener finalement qu'à une écoeurante défaite et sert directement les intérêts de la bourgeoisie. Le seul terrain sur lequel le prolétariat doit évoluer est son terrain de classe car il se doit d'être face à l'ennemi pour le combattre, pas à ses côtés.

En ce qui a trait aux syndicats, la question est plus délicate. Il est vrai qu'historiquement (particulièrement vers la fin des années 1800), les syndicats ont permis de défendre les intérêts de notre classe par certaines améliorations des conditions de vie (par exemple, la lutte pour la journée de huit heures) et ont quelque peu assumé des lieux où le prolétariat pouvait se réunir et se retrouver... Mais toujours dans la mesure où l'abolition du travail salarié n'était pas à l'ordre du jour.

Lors de la Première Guerre, le capitalisme est mondialement entré dans une phase où la perspective qu'il offre désormais à l'ensemble de l'humanité en est une cyclique de crises - guerres - reconstruction. À cet instant, la Révolution - et avec elle l'abolition du salariat en tant que classe - est devenu une perspective bien réelle, mais plus que tout nécessaire, pour le prolétariat et l'humanité toute entière. Confrontés de facto à une situation mondiale où l'abolition du salariat est maintenant nécessaire, les syndicats - animés par leur propre classe de bureaucrates soi-disant ouvriers - ont atteint un point où leur propre disparition est à l'ordre du jour et sont devenus, comme condition de leur survie, des défenseurs du capitalisme et les meilleurs négociateurs des termes de vente de la force de travail. Par ailleurs, nous ne pensons pas qu'il ne doit y avoir aucune intervention des minorités révolutionnaires au sein des appareils syndicaux. Seulement, ceux-ci ne peuvent être re-capturés par notre classe. À travers les assemblées syndicales, les minorités révolutionnaires se doivent de mettre de l'avant le programme prolétarien, de le défendre, et d'inviter les ouvriers et ouvrières à s'organiser en-dehors du cadre syndical, pour qu'il n'y ait pas sabotage de leur lutte. Cependant, s'il s'avérait qu'un syndicat, lors d'un évènement exceptionnel, propose des moyens développant la solidarité de classe et le contrôle de la lutte par la classe elle-même nous ne pourront qu'être en parfait accord avec celui-ci.

Au sujet de la ligne de parti, la conception qui est utilisée par les partis bourgeois et staliniens visent essentiellement à empêcher tout débat au sein de l'organisation. Staline et Mao ne se sont jamais empêchés de l'utiliser pour éliminer leurs concurrents, ou les véritables opposants marxistes, dans le parti. Les anarchistes craignent cette conception de la "ligne de parti" avec raison. Elle ne favorise en rien l'échange et enferme la théorie dans un cadre hermétique. Or, le marxisme est une théorie vivante, une théorie en mouvement qui se doit d'interpréter le cours réel des évènements. La ligne de parti stalinienne est la méthode inverse : elle tente de figer les conjonctures dans sa propre fenêtre et à rendre le parti le plus monolithique possible aux fins de ses propres dirigeants.

Dans le contexte de la Gauche Communiste, la "ligne de parti" serait la défense du programme prolétarien. Cela dit, contrairement aux staliniens (en incluant les maos), une grande place est accordée aux débats internes dans la GC qui peuvent même aller jusqu'à la constitution de fraction avec une aide matériel sur de nouveaux points politiques, par exemple lors d'un changement de conjoncture ou sur des points ambigus du programme. Bien qu'à vrai dire, on ne parle pas vraiment de "ligne de parti", surtout lorsque les conditions à l'éclatement d'une révolution ne semblent pas encore favorables.

Pour terminer, un mot sur l'autogestion. L'autogestion est, du point de vue de la Gauche Communiste, la gestion des entreprises par la classe ouvrière dans une société où la production de plus-value n'a pas été éliminée. C'est un moyen, pour le capital, d'intégrer les prolétaires aux problèmes que peuvent rencontrer les entreprises frappées par la crise, et dans lesquelles ils travaillent, en leur faisant organiser les modalités de leur propre exploitation. L'autogestion lie le prolétariat aux préoccupations de l'économie capitaliste qu'il a au contraire comme tâche de détruire. La classe ouvrière n'a pour objectif que l'instauration de sa propre dictature en abolissant les rapports de production capitalistes. C'est à cet instant qu'il peut prendre en charge la gestion de la production, en-dehors du cadre capitaliste.

Voilà pour l'instant. En espérant que ce ne soit que le début d'un processus d'éclaircissement mutuel. Nous joignons à cet envoi un texte écrit par le Courant Communiste International qui pourra vous indiquer un peu mieux où nous nous situons. C'est un excellent texte qui résume très bien les positions générales des groupes de la Gauche Communiste, même si nous ne sommes pas sympathisants de cette organisation. En effet, depuis quelques années, celle-ci a rencontré divers problèmes qui l'ont plongé dans une crise qui ne semble malheureusement pas sur le point de se résoudre. Cependant, elle a produit d'excellents articles au cours de son existence dont celui-ci. Nous aimerions éventuellement vous rencontrer, si vous êtes intéressés - et si vous jugez que le moment est bien choisi - pour échanger un peu plus en profondeur. Nous serons présents à la manifestation du 17 mars prochain pour distribuer des tracts. Peut-être pourrons nous nous y croiser?

En attendant une réponse de votre part,

salutations révolutionnaires,

A. pour des communistes internationalistes, Montréal 2007.

16/03/2007

Salut chers camarades communistes internationalistes,

Au nom du collectif, je tiens à dire que nous sommes également très heureux d'échanger avec vous (d'autant plus que vous êtes très intéressants à lire) et que nous sommes très ouverts à vous rencontrer éventuellement. D'ailleurs, vous allez certainement croiser quelques-uns d'entre nous à la manifestation du 17 mars.

Certes, il y a quelques divergences d'opinion au sein de notre collectif, mais nous sommes tous unis par le projet socialiste. En effet, notre objectif est avant tout de conscientiser le prolétariat dans une perspective socialiste et révolutionnaire. Pour ce faire, nous tentons de vulgariser la théorie révolutionnaire et les concepts comme la lutte de classe afin de rejoindre le plus possible le prolétariat et ainsi, l'encourager à se révolter contre le système capitaliste.

Aussi, j'aimerais préciser que nous nous opposons au parlementarisme et au réformisme. Pour ce qui est du parlementarisme, nous expliquons dans l'éditorial de notre tout premier numéro que le régime parlementaire est une méga supercherie qui embrasse les intérêts de la classe dominante. Pour ce qui est du réformisme, nous affirmons plus loin que le partenariat social et la réforme ne mènent à rien, si ce n'est que de nous pousser à aimer nos chaînes d'esclaves du système capitaliste. Ainsi, nous nous entendons à merveille sur le fait que c'est tout le système qui est à remettre en question et que la révolution constitue notre seule option.

Toutefois, en prenant en considération le contexte ou les circonstances actuelles, il faut comprendre que nous ne sommes pas en situation révolutionnaire; nous sommes à l'étape de la conscientisation. C'est pour cela que je crois que tous les moyens sont bons pour diffuser nos idées socialistes et ce, que ce soit à travers les luttes sociales, les luttes syndicales ou le parti de gauche modérée qu'est Québec solidaire. En temps que socialiste, je suis parfaitement conscient que si Québec solidaire ne remet pas en question le système capitaliste, il constituera un obstacle auquel nous devrons faire face. Mais, je connais un communiste très engagé au niveau international qui se présente comme candidat pour Québec solidaire, alors pourquoi ne pas en profiter pour véhiculer des idées socialistes et tenter de radicaliser les plus modérés ?

En ce qui concerne l'indépendance du Québec, je ne vois pas cela comme un projet bourgeois ou comme un projet appartenant au Parti québécois, mais comme une lutte pour la libération d'un peuple qui a été longuement opprimé par la Couronne anglaise. D'ailleurs, le Canada est le seul pays au monde ayant été colonisé par les Britanniques qui n'a pas rompu avec ce lien aristocratique. C'est un tout autre débat et je crois que tu ne devrais pas mettre tous les oeufs dans le même panier. Je suis avant tout un socialiste qui prône la révolution internationale tant souhaitée par Lénine, mais je suis également un Québécois qui adore son peuple. Notre peuple, en plus d'avoir été exploité par la bourgeoisie anglaise puis par la bourgeoisie québécoise, a dû survivre à travers un régime monarchique qui lui a été imposé.

En effet, le fédéralisme canadien est une monarchie constitutionnelle qui a été fondée de façon antidémocratique pour assimiler le peuple québécois et construire un nouvel empire impérial. Cette monarchie, qui attribue au gouvernement central des pouvoirs considérables (prérogatives, privilèges, immunités, mainmise sur les compétences du Québec etc.) en plus d'être conçue de manière à s'autoconserver (via la Constitution canadienne), ne peut que nuire, de par sa lourde stabilité, au peuple québécois (stabilité de l'ordre actuel = stabilité de la bourgeoisie). La libération nationale ne remet pas en cause le capitalisme, je te l'accorde, mais le fait de casser ce foutu régime quasi-unitaire bouleverserait l'ordre social actuel. Je vois, en la libération nationale, une merveilleuse possibilité de se libérer du joug canadien et de décider de façon plus autonome en instaurant un nouveau régime. En plus, cela nous permettrait d'être libre sur la scène internationale et de diffuser, en tant que pays, des idées de gauche à travers le monde. Peut-être, avec un régime monarchique et un gouvernement bourgeois en moins, aurions-nous plus de marge de manoeuvre dans nos luttes ? Peut-être aurions-nous plus de facilité à lutter contre le patronat si le gouvernement fédéral n'était pas là pour lui venir en aide ? (Ceci est mon opinion personnelle et non celle du collectif).

Bref, il y a certes quelques divergences, mais comme dirait mon camarade Rémi, je vais t'avouer que votre projet me plaît. À bientôt!

Salutations révolutionnaires,

Camarade Ben, du collectif Le feu aux poudres

19/03/2007

Au collectif Le feu aux poudres

Le 19 mars 2007

À Ben du collectif

Chers camarades,

Nous voulons, suite au dernier envoi de Ben, clarifier certaines positions. Nous sommes d’accord quand vous dites « notre objectif est avant tout de conscientiser le prolétariat dans

une perspectives socialiste et révolutionnaire… et rejoindre le plus possible le prolétariat et ainsi, l’encourager à se révolter contre le système capitaliste » Il est clair pour vous comme pour nous que dans le cadre des « concepts comme la lutte de classe » que la seule classe qui peut détruire le système capitaliste c’est le prolétariat.

Nous ajoutons qu’il n’y a aucune autre classe révolutionnaire à l’époque actuelle, époque de

décadence du capitalisme. La classe ouvrière mondiale est la seule classe qui a intérêt à construire un nouveau type de société complètement différent, sans frontière entre autres.

Cependant, actuellement, les révolutionnaires sont les éléments de la classe qui se hissent les premiers à une "intelligence nette des conditions de la marche et des fins générales du mouvement prolétarien" (Manifeste Communiste). En d’autres mots, les communistes sont ceux qui voient à long terme les intérêts de la classe. Comme le disais un révolutionnaire russe, ils ne regardent pas le cul des ouvriers.

Nous sommes d’accord aussi quand vous dites « que le régime parlementaire est une méga supercherie qui embrasse les intérêts de la classe dominante ». La classe dominante, pour nous c’est la bourgeoisie quelle que soit sa nationalité et/ou sa langue.

Nous divergeons et là nous pensons qu’il y un éloignement sinon un rabaissement de la conscientisation des prolétaires quand vous dites que QS « constituera un obstacle ». QS constitue actuellement un frein très grave à la conscientisation révolutionnaire, à l’internationalisme et même à la défense des intérêts à court terme des ouvriers :

1° Face à la désillusion que crée le Capital, leur solution c’est non de l’abattre mais de prolonger son existence, sa démocratie, son extorsion de la force de travail de notre classe. Ils cherchent à nous faire voter parce qu'il croit le capitalisme éternel alors, selon eux, faisons avec!

Par son jeu électoral et sa valorisation du parlementarisme.

Par son nationalisme qui s’oppose à l’internationalisme.

Par sa constitution qui ne se base nullement sur la classe ouvrière.

Par sa volonté d’en arriver à créer un autre pays capitaliste dans le monde.

Alors quand vous dites qu’il y a « un communiste très engagé au niveau international qui se présente pour Québec Solidaire », nous sommes surpris. Faut-il rappeler à ce «communiste » ce que Marx disait sur toute les tribunes «Prolétaires de tous les pays, Unissez-vous ». Beaucoup de ces « communistes » font leur le postulat de Staline du « socialisme dans un

seul pays » avec les conséquences désastreuses que cette idée a eu sur les prolétaires russes dans les années 20 : capitalisme d’état, soumission des pc au p «c» russe et abandon total de la révolution mondiale.

Des militants de la gauche capitaliste sont entrés au PQ au début des années 70 pensant gauchir le PQ afin d’avoir un pays plus à « gauche » (Plus d’entreprises d’état, ça n’a rien à voir avec le socialisme). Depuis 4 à 5 ans, le SPQL tente de faire la même chose. Résultat dans les deux cas, ils se sont soumis soit à Lévesque ou maintenant à Boisclair. D’autres tentent aussi de faire aussi la même chose dans QS. Tout cet entrisme afin non pas de lutter contre le capitalisme mais de réformer l’état québécois.

S’il y a quelque chose à faire pour les prolétaires dans QS c’est de sortir au plus vite de cette souricière et de commencer à s’organiser sur leur propre base avec les acquis du marxisme et de la Gauche communiste.

QS charrie beaucoup d’ambiguïté avec les mots peuple, nation ou citoyen. En cela il n’est pas différent des autres partis bourgeois. Dans notre tract, nous disions que les politiciens et les syndicalistes utilisent le mot citoyen pour nous faire oublier l’existence de la classe ouvrière. C’est pareil avec les concepts de peuple ou de nation. Les classes sociales existent dans les peuples et les nations et c’est le jeu de l’idéologie dominante de cacher cela.

Depuis la fin de la Première guerre mondiale, toutes les luttes de libération nationale ont favorisé une puissance impérialiste contre une autre. Par exemple la bourgeoisie vietnamienne dirigeant le parti des travailleurs vietnamiens a été un instrument de l’impérialisme russe contre l’impérialisme américain. Une nouvelle bourgeoisie s’est créée au Vietnam sur le dos de sa classe ouvrière au prix de millions de morts.

Au Québec la situation est très différente des pays de la périphérie capitaliste, il y a des monopoles québécois (ou multinationales) qui exploitent la classe ouvrière mondiale dans plusieurs pays. Ces monopoles québécois sont en lutte contre l’impérialisme américain ou canadien, parfois en alliance, tout cela dans une relation dialectique. (Note 2)

Nous ne voyons absolument pas comment la création d’un état capitaliste québécois impérialiste, capitalisme d’état ou privé, réformé, ferait avancer d’un seul pas la classe ouvrière.

Oui la bourgeoisie québécoise et la petite-bourgeoise comme Françoise David feraient des gains étatiques sur le dos de notre classe. Il n’y a qu’une façon de mettre fin à l’oppression nationale c’est de s’attaquer à sa propre bourgeoisie en faisant notre part comme membre notre classe à l’échelle mondiale. La seule patrie des prolétaires c’est le monde entier. L’abolition de l’esclavage salarié, de la propriété des moyens de production et des états qui maintiennent cela en place est le seul garant de l’abolition de toute forme d’oppression.

Ben nous écrit « Peut-être, avec un régime monarchique et un gouvernement bourgeois en moins, aurions-nous plus de marge de manoeuvre dans nos luttes ? » Comme internationaliste il n’y aurait pas un gouvernement bourgeois en moins mais un de plus dans le monde : l’état impérialiste québécois. Soit dit en passant le Canada est un pays où la bourgeoisie a tout

les droits. Ce pays n’a rien d’un régime féodal. Les représentants de la Reine (qui est bien plus une grosse bourgeoise avec ses investissements qu’une reine) sont un symbole qui coûte cher certes, mais qui sert surtout à semer la confusion sur la nature de classe de l’état canadien c’est-à-dire une dictature complète de la bourgeoisie.

Il dit aussi « Peut-être aurions-nous plus de facilité à lutter contre le patronat si le gouvernement fédéral n'était pas là pour lui venir en aide ? » Dans le monde réel actuel, les gouvernements bourgeois s’aident entre eux au-delà des frontières quand il s’agit d’écraser la classe ouvrière en lutte. Il y a plusieurs faits qui attestent ça. Lors de la Commune de Paris 1871, l’armée allemande a cessé les hostilités pour permettre à l’armée française d’écraser les communards. Lors de la Première guerre mondiale, la bourgeoisie de plusieurs pays a décidé d’arrêter de s’entre déchirer pour mâter leur propre classe ouvrière. Une grève illégale par exemple d’ouvrier de Bombardier du Québec et d’Ontario serait écrasée conjointement par les deux états. Cependant ils seraient beaucoup plus difficiles pour les prolétaires de partir un tel mouvement si la bourgeoisie et la petite bourgeoisie québécoise avaient réussi à rallier une partie de notre classe à son projet.

Les prolétaires n’ont qu’une patrie, le monde entier.

Salutations internationalistes

Steve pour des communistes internationalistes,

Montréal.

26/03/2007

Bonsoir camarades,

Je tiens à faire suite au dernier envoi du camarade Steve. Tout d'abord, je vous donne raison en ce qui concerne Québec solidaire. Je ne connaissais pas beaucoup ce parti, mais j'ai réalisé que QS ne remettait malheureusement pas le système capitaliste en question. De toute façon, le fait de lutter à l'intérieur d'une arène capitaliste dont les règles et l'arbitrage sont fabriqués par le patronat conduit automatiquement à la défaite. Pire encore, le fait d'évoluer à travers le régime parlementaire mène à la récupération par le capitalisme ou à la prostitution au capital. À la limite, l'élection d'un parti comme QS pourrait contribuer à une certaine amélioration des conditions de travail par la voie de mesures ou de réformes, mais je pense que cela ne pourrait que faire du tort à la classe ouvrière car en guise d'exemple, l'adoption d'une loi pour hausser le salaire minimum pousserait davantage les ouvriers à aimer leurs chaînes plutôt que de les détester et de les détruire. Autrement dit, la force du partenariat social est en lien

direct avec la faiblesse de la classe ouvrière et par le fait même, 'impuissance du mouvement révolutionnaire. Bref, il va de soi que nous ne pouvons compter sur QS pour instaurer une lutte de classe menant à l'abolition du capital.

En ce qui concerne l'indépendance du Québec, je suis conscient du fait que la classe bourgeoise du Québec y voit une opportunité en or pour acquérir toujours plus de pouvoir. Aussi, j'ai bien aimé votre classement des monopoles québécois avec les chiffres d'affaires et les profits réalisés par nos grands patrons capitalistes. Il y a de quoi faire rougir de colère un

prolétaire! Je veux bien croire que la bourgeoisie veut s'approprier l'indépendance du Québec, mais je refuse de croire qu'il s'agit d'un projet bourgeois. Le nationalisme est-il vraiment opposé à l'internationalisme? Si nous prenions le cas du nationalisme américain, celui-ci se veut moraliste et messianiste en souhaitant puissamment propager ses valeurs et imposer sa bonne nouvelle soi-disant démocratique partout à travers le monde (et partout à travers l'univers s'il en avait l'occasion!). Il va de soi qu'un tel nationalisme est en faveur de la globalisation économique/culturelle actuelle, en plus d'être opposé à un éventuel mouvement communiste internationaliste. Alors oui, le nationalisme américain est impérialiste et opposé à l'internationalisme.

Maintenant, le nationalisme québécois est-il opposé à l'internationalisme? Pas nécessairement. Mon nationalisme n'a rien à voir avec celui qui sévit aux États-Unis. Il n'est pas une machination bourgeoise conçue pour aveugler les prolétaires et étendre la puissance impérialiste, il s'agit tout simplement d'un acte de libération d'un peuple de travailleurs qui a dû faire face à près d'un quart de millénaire d'exploitation et d'humiliation.

Croyez-vous que les Patriotes, qui se battaient pour la liberté et pour la justice sociale, étaient accoutrés de redingotes et de hauts-de-forme? Non. Des bourgeois ou parlementaires canadiens français tel Georges-Étienne Cartier ont trahi le peuple canadien français (les prolétaires de langue et de culture française en territoire québécois) en concluant le "pacte"

antidémocratique de la "confédération". En effet, ils se sont affiliés avec les bourgeois ou parlementaires canadiens anglais tels MacDonald et Brown pour installer leur dictature bourgeoise à la fois complète et complexe... Le projet de l’indépendance du Québec se veut à la base un gage de liberté et de justice sociale. Tout est dans le processus de création ; ce processus amènerait les Québécois à réfléchir à ce qu’ils veulent vraiment dans le cadre de ce nouveau pays et je vois ici une possibilité unique de remise en question du régime et de conscientisation sociale. Mon nationalisme n'est pas fanatique au point d’être impérialiste, pas plus qu’il ne soit aveugle au point de croire au socialisme dans un seul pays; son ouverture d'esprit épouse parfaitement l'internationalisme. Bien que je respecte nos frères et nos soeurs prolétaires canadiens anglais, l'histoire n'a pas rendu justice envers mon peuple de travailleurs humiliés qui aurait, j'en suis persuadé, un potentiel révolutionnaire assez élevé une fois le nouveau pays créé.

Bref, je tenais ici à faire valoir mon point de vue sur la légitimité du projet d'indépendance du Québec. De toute façon, j'ai fait le choix de me concentrer sur la cause socialiste. Mais, on ne peut en dire autant d’une majorité de Québécois francophones. Lorsque je parle à plusieurs de mes frères et sœurs prolétaires, l'idée de l'indépendance du Québec est encrée profondément dans leur coeur et il faudrait pratiquement le leur arracher pour qu’ils renoncent à ce projet. Ce dernier est parti pour durer alors, aussi bien en finir une fois pour toute et après, nous pourrons tous nous concentrer sur le vrai débat: socialisme vs capitalisme.

Enfin, en ce qui concerne l’avènement du socialisme, c’est clair qu’il faut créer une prise de conscience ainsi qu’une forme d’organisation à l’échelle planétaire et la création d’un parti socialiste internationaliste est un pas dans la bonne direction. Les prolétaires n’auront comme patrie le monde entier lorsqu’ils seront enfin conscients qu’ils sont tous dans le même merdier et qu’il faut une lutte communément organisée pour y remédier. Mais à mon avis, la révolution internationale repose d’abord sur les peuples des sociétés industrialisées qui sont concentrées en Occident (Etats-Unis, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Canada, Québec… mais aussi la Chine). Il nous faut battre le capitalisme sur son propre terrain et le faire imploser de l’intérieur afin d’installer la dictature du prolétariat.

Salutations révolutionnaires,

Camarade Ben, du collectif Le feu aux poudres.

27/03/2007

Salutations camarades,

La réponse que vous nous avez envoyée est très bien articulée par rapport au nationalisme / internationalisme. Par ailleurs, nous pensons qu'elle a été assemblée à l'envers. En effet, immédiatement, le prolétariat n'a pas de patrie! Le fait de partir du point de la construction de "sa" soi-disant patrie pour éventuellement parvenir à l'internationalisme socialiste n'a pas de sens pour nous puisque, comme nous le répétons, le prolétariat est immédiatement internationaliste. La patrie - la nation - est le cadre juridique que s'est donné la bourgeoisie duquel s'élève l'accumulation de capitaux, dans une compétition féroce qui n'appartient nullement au prolétariat. C'est tout pour l'instant.

Cette réponse est loin d'être exhaustive, nous le concevons…

Alex pour d'autres communistes internationalistes

29/05/2007

Salutations camarades,

Vraiment, mais vraiment désolé pour ce retard. Cependant, ne vous en faites pas, nous ne vous avions aucunement oublié. C'est que les dernières semaines nous ont vu passablement occupés sur le plan théorique. Comme nous vous en avions déjà fait part, nous sommes toujours en discussion au sein même de notre collectif en vu de munir notre noyau de la plus grande clarification programmatique possible.

Nous avons réalisé récemment que nous étions peut-être un peu en train de nous "bousculer en avant" sans même nous être encore dotés de positions claires et sans compromis face à ce monde qui nous entoure et qui tente à chaque moment de nous rappeler aux positions idéologiques de notre ennemi de classe : la bourgeoisie. L'arme la plus acérée pour notre classe demeurera, jusqu'au renversement du capitalisme, sa propre conscience et son organisation. Aussi, nous essayons donc de prendre part à cette tâche d'affûtage de la conscience prolétarienne en étudiant de plus près les positions véritables de la classe ouvrière, et en tentant de mettre de l'avant une organisation capable de participer au regroupement des forces du camp prolétarien.

Maintenant, reprenons où nous étions rendu dans notre discussion. D'abord, nous sommes très heureux que vous ayez constaté (et nous reprenons vos propres mots) que "de toute façon, le fait de lutter à l'intérieur d'une arène capitaliste dont les règles et l'arbitrage sont fabriqués par le patronat conduit automatiquement à la défaite. Pire encore, le fait d'évoluer à travers le régime parlementaire mène à la récupération par le capitalisme ou à la prostitution au capital."

En effet, le rejet du parlementarisme "révolutionnaire" est une des positions de base de l'internationalisme prolétarien car c'est une voie qui le conduit directement dans le camp de la bourgeoisie. Pour le prolétariat, son seul terrain de lutte est celui qui remet en cause toutes les institutions dont la bourgeoisie s'est dotée dont entre autres, les institutions du Capital (ce qui comprend donc le rejet de l'autogestion "ouvrière"), et l'État (dont sa forme législative, le parlement).

Maintenant, nous vous citons encore une fois : "Mon nationalisme n'a rien à voir avec celui qui sévit aux États-Unis. Il n'est pas une machination bourgeoise conçue pour aveugler les prolétaires et étendre la puissance impérialiste, il s'agit tout simplement d'un acte de

libération d'un peuple de travailleurs qui a dû faire face à près d'un quart de millénaire d'exploitation et d'humiliation."

En premier lieu, camarades, l'analyse que vous produisez du nationalisme / impérialisme engendre ipso facto une hiérarchisation des différents nationalismes (lire ici impérialismes) qui composent l'univers de la bourgeoisie. Vous laissez ainsi s'infiltrer l'idée qu'il y aurait de "petits impérialismes" - des impérialismes de secondes mains (si petits soient-ils qu'ils ne semblent même pas "jouer du coude" pour avoir leur place sur l'échiquier mondial) - qu'il faudrait défendre contre des impérialismes plus puissants (dont les volontés sont immédiatement affirmées). Il faut d'abord situé l'époque dans lequel le capitalisme se trouve, c'est-à-dire celle de la décadence. Dans l'époque décadente du capitalisme - celle où ce système n'a plus rien à offrir à l'humanité qu'un cycle infernal de crises / guerres / reconstruction - on entre dans une ère d'impérialisme généralisée. Par exemple, prenons le cas des impérialismes les plus faibles : s'ils n'ont pas pratiquement les moyens d'imposer leur volonté immédiate à de plus forts, ils peuvent néanmoins commettre des alliances avec ceux-ci et, du même coup, imposer leur vision du monde aux autres impérialismes, faibles ou puissants. Ainsi, ceux-ci arrivent à imposer leur volonté par l'intermédiaire du bloc dans lequel ils se trouvent, par l'intermédiaire des alliances qu'ils ont conclues.

Car à l'ère de la décadence, aucune nation n'arrive à véritablement agir seule. À un moment ou à un autre, chaque impérialisme se doit de former une alliance pour imposer sa volonté mondialement, particulièrement lors de guerres impérialistes généralisées. Maintenant, prenons l'exemple du petit état palestinien. En effet, celui-ci cherche à tous les jours à gagner sa cause. Il est donc impérialiste aussi petit soit-il. Si pour gagner plus facilement, il forme une alliance avec un autre pays plus puissants, dès lors son impérialisme apparaît plus clairement ; mais sa nature a toujours été et restera toujours impérialiste peu importe sa force immédiate réelle. Si on reprend le concept utilisé par Marx dans le chapitre inédit du Capital - le concept de domination réelle et formelle - nous apercevons que dans la phase de domination réelle du capitalisme (celle où ce système s'est généralisée), le capitalisme s'est tellement étendu à tous les coins du globe, à toutes les sphères de la société, à presque tous les aspects de la vie - à sa volonté de s'étendre à tous les aspects de la vie - que même la simple petite ethnie perdu aux fonds de la brousse peut jouer un rôle dans le fait de propager une volonté impérialiste. Nous prenons l'exemple de l'Assemblée des Premières Nations, en tant que pôle de la bourgeoisie amérindienne, qui possède ses propres intérêts en concertation à la fois avec la bourgeoisie québécoise, et canadienne... Ce serait aussi le cas d'un Québec souverain. Il n'y a pas possibilité pour un Québec indépendant de survivre en dehors de ce cadre. Automatiquement, lors de sa formation en tant qu'État-Nation, il aura à s'imposer sur le plan international et à se perdre en tractations avec la bourgeoisie environnante. Automatiquement, il est dans le camp bourgeois (que ce soit la redingote, les hauts de formes, ou les chiennes de mécanicien qui soit à la mode à ce moment). Derrière un combat nationaliste se cache toujours - qu'elle soit consciente ou non - une volonté de s'affirmer en tant qu'impérialisme, en tant que bourgeoisie mortifiant la classe qu'il domine. Nous ne le répéterons jamais assez : la seule frontière que le prolétariat puisse reconnaître est sa frontière de classe, celle qui l'oppose tous les jours à sa classe ennemie : la bourgeoisie!

Pour conclure, reprenons vos mots : "Il nous faut battre le capitalisme sur son propre terrain et le faire imploser de l’intérieur afin d’installer la dictature du prolétariat."

Nous ne pouvons le dire autrement : nous sommes en désaccord complet avec cette phrase. Le terrain du capitalisme sera toujours celui où il lui est possible de conserver, de reproduire, et même de reconstituer ses forces. Le prolétariat tentant de vaincre le capitalisme sur son propre terrain finit toujours par se faire battre d'une façon ou d'une autre, la plupart du temps en se faisant intégrer lui-même - soit de façon consciente, soit de façon inconsciente - dans les institutions de la bourgeoise. Il ne s'agit pas forcément de mauvaise volonté comme vous pouvez le voir ; mais la machine bourgeoise possède ses propres règles et est subtile dans son approche des forces qui veulent son renversement. Le bûcheron ne scie pas la branche sur laquelle il est assis en croyant qu'il va abattre l'arbre au complet. Il doit descendre de l'arbre et attaquer son tronc. Le prolétariat ne connaît pas de division en son sein et ne doit pas reconnaître les tactiques qui appartiennent à la bourgeoisie, laquelle tentera toujours par tous les moyens de l'intégrer à son système pour mieux la bâillonner. Prochainement, nous vous feront parvenir nos positions de base en espérant que vous puissiez les discuter au sein de votre groupe.

Fraternellement,

A. pour d'autres communistes internationalistes, Montréal

cim_icm@yahoo.com

CIM_ICM C.P. 55514, Succ. Maisonneuve, Montréal, QC H1W 0A1

Note 1- Depuis cette date une brochure critique et autocritique sur le maoïsme a été publiée par nous: Du nationalisme à l’internationalisme:

klasbatalo.blogspot.com/2009/11/du-nationalisme-linternationalisme.html

Note 2- Sur les monopoles de l’impérialisme québécois http://www.cmaq.net/node/31086