dimanche 5 décembre 2010

Contribution à un état des lieux de la Gauche Communiste Internationale


À lire notre retour critique sur Contribution à un état des lieux...

Les CIK,16 mai 2012.


Récemment, les communistes internationalistes – Klasbatalo!, anciennement connu sous l’acronyme CIM, ont eu la chance de rencontrer leurs camarades de la Fraction de la Gauche Communiste Internationale. Cette rencontre a non seulement été des plus fructueuses, fraternelles, et positives, mais a également permis de clarifier nombre de difficultés auxquelles les forces du Milieu Politique prolétarien sont confrontées depuis quelques années. Entre autres chose fut abordée la nécessaire question du regroupement des organisations se réclamant de la Gauche Communiste face aux derniers départs – ou scissions – qui eurent lieu au sein à la fois de la TCI, du CCI, du PCI, et de la FICCI. Ce problème qui accable l’ensemble des groupes issus du Milieu Politique prolétarien, ou camp prolétarien, ne semble pas sur le point de se résorber, bien au contraire. La plupart des groupes issus de ce courant se replient de plus en plus sur leurs positions, sans aborder l’ombre d’une discussion avec d’autres groupes issus du même héritage, quand ils ne délitent pas carrément leurs positions pour se rendre plus accessible à d’autres groupes portant l’épithète « Internationaliste ». La réponse produite à la fois par Controverses et la FGCI à ce sujet (respectivement, annexe 1 et annexe 2), réponse quelque peu divergente, explique relativement bien la situation dans laquelle nous pataugeons en tant que courant[1].
Aussi, comme il est normal lors de l’affûtage d’une discussion tranchante, quelques désaccords ou incompréhensions de part et d’autre, incluant même à l’intérieur de notre groupe, furent observés sur la question du Bilan des trente dernières années qu’a vu dérouler notre héritage. Les deux textes présentés en annexe, qui font l’état des lieux de l’ensemble des groupes se revendiquant de l’héritage gauche communiste – et qui arrivent à des conclusions forts différentes – sont à l’origine de ces divergences.
Les textes Il est minuit dans la Gauche Communiste du groupe Controverses, et le camp prolétarien a-t-il définitivement fait faillite? produit par la FGCI, représentent ces deux textes aux positions à-priori opposées. C’est donc dans un souci de clarification politique que nous nous sommes donnés pour mandat de répondre aux deux groupes en tentant – à supposer qu’il soit possible de le faire, ce que nous pensons – de les concilier. Car, aux premiers abords, ces deux positions semblent irréconciliables : deux fins de non-recevoir (le bilan de Controverses se veut d’ailleurs « sans appel car il se fonde sur des éléments matériels et objectifs que tout un chacun peut facilement vérifier (annexe 1) »).
Nous assistons, par ces deux analyses, à un bilan tranché du groupe Controverses et à une réponse au bilan toute aussi tranchée de la part de nos camarades de la FGCI. Pourtant, après maintes discussions, il nous semble qu’une synthèse soit non seulement nécessaire pour l’ensemble des groupes qui se situent directement sur le terrain de classe mais également possible. De fait, comme c’est souvent le cas dans notre courant, les réponses de parts et d’autres se révèlent bien souvent binaires et pauvres d’explications approfondies.
Notons au préalable que le texte que nous produisons aujourd’hui se veut avant tout la critique des deux articles présentés ci-haut; cependant, puisque le marxisme se veut un corpus théorique dialectique, et une vue d’ensemble la plus large possible qui ne se confine pas à l’étude des particularismes, le présent document de notre part se veut également et immanquablement une critique à froid du groupe Controverses et de la FGCI. Aussi, le débat autour de ces deux textes résume une discussion que nous avions eu au sein des CI-K en vue d’un document résolutoire; d’un positionnement théorique face à la tendance actuelle de repliement sur soi – ou de liquidation des positions programmatiques – des groupes du camp prolétarien et vers lequel les CI-K devait converger en pratique. Par la suite, cette discussion a été menée également avec nos camarades de la FGCI.
Préserver à tout prix l’organisation?
D’entrée de jeu, le texte de Controverses se veut un questionnement par rapport à la nécessité ou non de préserver à tout prix des organisations qui ne répondent plus forcément aux circonstances qui les ont vues naître; qui ne sont plus synchronisées – pensent Controverses – sur « l’évolution du rapport de force entre les classes ». En effet, en prenant Marx et Engels comme point d’appui, le texte se veut implicitement un appel à saborder les trois principales organisations actuelles de la GC : le Courant Communiste International, la Tendance Communiste Internationaliste, et le Parti Communiste International (Le Prolétaire – bordiguiste). Citons ainsi le texte de Controverses :
Comme le surgissement et la disparition des organisations révolutionnaires dépendent très étroitement de l’évolution du rapport de force entre les classes, et que l’exacerbation des conditions objectives et subjectives à la base des mobilisations ouvrières se déploie sur un laps de temps relativement court, Marx et Engels concevaient que l’existence de ces organisations était temporaire, intrinsèquement liée aux flux et reflux des luttes.
C’est effectivement comment Marx et Engels voyaient la mise sur pied et la disparition des organisations politiques dont se dotait le prolétariat. Loin de s’agiter à mettre de l’avant à tout prix des organisations de classe, tel un Don Quichotte combattant ses moulins à vent, Marx étudiait constamment le cours historique des luttes afin d’y voir surgir les éléments desquels émergeait la théorie; pour que celle-ci transforme la prise de conscience en soi du prolétariat en prise de conscience pour soi. Au demeurant, Marx ne cherchait pas la confrontation de classes à tout prix. Le prolétariat est un corps social qui s’épuise et est appelé à se décourager dans l’agitation de vaines luttes et promises à l’échec. L’Histoire a démontré que les organisations politiques dont se dote la classe prolétarienne, sont les plus fécondes quand elles répondent à la nécessité de se regrouper, de s’organiser, de développer plus en avant l’analyse du cours historique des luttes.
L’organisation qui subsiste après avoir vu différentes luttes prolétariennes, avec une forte potentialité de rupture dans son rapport de classe, sans jamais avoir su y intervenir pour y insuffler le programme communiste avec des mots d’ordre révolutionnaire; cette organisation, disons-nous, ne se trouve plus en phase avec le processus réel qui doit conduire ultimement le prolétariat à établir sa dictature contre l’ordre bourgeois. C’est ainsi, dans le cours ascendant des combats ouvriers, lorsque le capital fait payer sa crise aux producteurs de plus-value (bref lorsque le prolétariat est attaqué), que le rapport dialectique organisation / classe – classe / organisation est à son paroxysme. C’est à ce moment que la lutte produit plus clairement la théorie formulée par l’avant-garde révolutionnaire, dans un rapport constant avec sa classe; théorie qui sera ensuite réinjectée dans la classe et lui permettra de transformer sa conscience en soi en une conscience pour soi. Dans une lutte aux pointes acérées, il y aura toujours de petits groupes qui se formalisent ça et là et qui sont – à cet instant – plus en phase, plus en lien, avec le processus de la transformation graduelle des luttes. Les soviets ouvriers n’en sont qu’un exemple. Toutefois, ces petits groupes naissants (souvent sans grande expérience organisationnelle) cherchent à briser leur isolement en provoquant la discussion au sein de la classe, discussion qui saura provoquer la réponse d’autres groupes et ipso facto une clarification des réponses programmatiques. À cet instant, le parti est à l’ordre du jour.
Aussi, comme le souligne bien Controverses à cet effet :
(…) l’histoire a systématiquement démontré que, fondamentalement, [les organisations politiques du prolétariat] surgissent tout naturellement au cours des phases d’effervescence sociale et se disloquent lors des périodes de reflux.
Après le reflux du cours des luttes, lire de l’épuisement du prolétariat écrasé le plus souvent du temps par sa défaite, l’organisation tend à chercher une légitimité à la préservation de son existence. Elle tend alors à s’enfoncer dans des analyses particulières qui la divisent sur des questions de second ordre[2].
Le fait est que les organisations vont et viennent. Elles surgissent dans l’Histoire et disparaissent. Rappelons que ce ne sont pas les groupes, les organisations, les partis politiques du prolétariat qui font la Révolution mais bien le prolétariat dans son ensemble, en produisant ses avant-gardes politiques en lien – et véritablement synchronisés – avec le cours historique des luttes; ce sont ces organisations qui sauront produire les mots d’ordre et consignes révolutionnaires en dirigeant la lutte générale en ce sens, c’est-à-dire vers une transcroissance des luttes en direction du projet révolutionnaire. La fin d’une organisation qui a été mise sur pied lors d’un flux croissant des affrontements de classes[3] n’est pas la faillite du programme qu’elle défendait. Tous les acquis théoriques positifs produits au cours de la période – disons ascendante – de production de l’organisation demeurent après son démembrement, et s’inscrivent ainsi dans le programme révolutionnaire enrichi par cette contribution historique; mais à condition que les organisations qui sont un produit de ce démembrement en réclament une continuité historique, ce que ne semble pas enclin Controverses à faire présentement. Nous reviendrons sur ce point plus loin dans le texte.
Cependant, avec Controverses, nous pensons qu’une organisation s’évertuant à subsister malgré un cours historique défavorable, qui ne produit plus de luttes à fort contenu théorique, risque considérablement de ne plus se comporter – de ne plus agir – en tant qu’organisation révolutionnaire et risque plutôt, dans cette période, de se comporter telle une pathétique secte d’élus. D’avant-garde révolutionnaire, les chances sont fortes pour qu’elle se meuve à présent plutôt en Cabale ouvrière, perdue dans la nécessité absolue de voir surgir LA lutte pouvant soulager ses doutes et lui donner raison. C’est réellement la différence entre une organisation révolutionnaire de prolétaires, et une secte organisée autour du prolétariat : la première cherche à influencer le cours des luttes, est prête à débattre d’erreurs historiques tout en cherchant à dépasser ses propres erreurs historiques, et à ultimement transformer l’histoire; tandis que la seconde cherche tout simplement à se préserver à tout prix dans le temps, en se repliant sur elle-même, attendant je-ne-sais-quoi, la fin de l’histoire?
Jean-Louis Roche, dans son Histoire du Maximalisme, est d’ailleurs très direct concernant le Courant Communiste International à cet effet :
« Je regrette que le CCI n’ait pas su mourir à temps, survivant péniblement à ses avaries de fin de siècle. Il serait devenu certainement une vedette comme James Dean ou Guy Debord, au lieu de ce qu’il est, une vieille dame percluse de rhumatismes théoriques, obsédé par de douteuses histoires de sorcières. »
Le ton semble à l’humour mais pose à la fois une question pertinente; celle de savoir si une organisation qui s’évertue à résister vents et marées alors qu’elle ne cesse de subir intérieurement les coups et assauts de l’idéologie bourgeoise ne devrait pas se dissoudre pendant que les acquis qu’elle a produit sont encore à la cime du programme politique de sa classe, et une référence future – dans ses points forts – pour la prochaine organisation du prolétariat[4]. Car, pour pousser encore plus loin le drame des organisations au corps malade, Controverses souligne l’autisme dans lequel les principales organisations issues de la Gauche Communiste se sont vautrées depuis le début des années quatre-vingt. En réalité, pire qu’une forme d’autisme, ces organisations semblent avoir vécu de véritables épisodes de psychose. En effet, l’autiste ne se rattache plus au monde extérieur, ne tente donc pas de convaincre les autres de la justesse de ces positions (et ne les induit donc pas non plus en erreur), tandis que les organisations qui semblent évoluées dans ce genre de situation continuent d’accorder un profond attachement au monde extérieur – les luttes – qui semblent les confirmer à tout moment, de façon rétroactive, dans la vision qu’elles ont du cours historique… Mais en en déformant malheureusement l’analyse lors de crises passagères qui produisent également les scissions. Ces organisations peuvent ainsi continuer de produire à l’occasion d’excellentes analyses, de tirer des conclusions formidables; mais en général, elles se replient graduellement sur elles-mêmes parce qu’elles sont de plus en plus fragiles et de moins en moins aptes à pouvoir tolérer la critique. De fait, leur dynamisme interne commence à prendre l’aspect des organisations staliniennes appliquant la loi du silence face aux divergences et elles perdent vigueur et dynamisme, de moins en moins capable de produire une théorie vive d’enrichissement programmatique[5]. Les analyses risquent graduellement de se voir bâclées, erratiques, et déconnectées du cours historique réel. D’organisations vivantes et enrichissantes – capables de répondre aux nécessités historiques de la classe et de se lier au cours historique réel des luttes – elles risquent ainsi de devenir de véritables repoussoirs pour le prolétariat comme cela peut sembler être le cas pour le CCI[6] et la TCI[7] actuellement.
Notons qu’en dépit de la volonté de ses membres de la préserver, en réalité, lorsqu’une organisation disparaît, c’est malheureusement, et tout simplement, qu’elle n’est plus en mesure de faire face à la conjoncture dans laquelle elle se trouve; et si elle bascule dans le camp de la bourgeoisie, c’est qu’elle n’a pas développé l’expérience et l’intelligence historique requises pour faire face à la conjoncture dans laquelle s’articulent les luttes de sa classe[8]. Ceci dit, notons encore une fois que seule l’Histoire s’avère apte à prononcer sa dissolution.
Scissions, fraction, et continuité historique
C’est ainsi que nous partageons en partie l’analyse de Controverses – et de Marx et Engels – concernant la remise en question sur la nécessité absolue de vouloir préserver les organisations existantes.
Aussi, même si nous saluons les efforts de nos camarades de Controverses de vouloir entrer dans un processus de remise en questions et de bilan, nous tenons également à leur rappeler que les scissions et fractions sont un processus de la formation du parti et représentent une filiation historique, dont Controverses (et la FICCI entre autres groupe) font partie. Nous partageons en partie la critique de la FGCI lorsqu’elle affirme en s’adressant implicitement à Controverses :
« S'appuyant sur le constat immédiat, mais non moins réel, de division et de sectarisme qui frappent les groupes se revendiquant de la Gauche communiste, ces éléments en rupture d'organisation et en quête de "liberté individuelle" affichent ainsi leur rupture - non déclarée, non ouvertement revendiquée - avec les orientations politiques qu'ils avaient pourtant défendues durant parfois des décennies au sein de leur organisation, en l'occurrence pour ces derniers dans le CCI. »
Il nous semble donc, au premier abord, qu’effectivement Controverses a claqué la porte du CCI très rapidement, sans apporter plus d’éclaircissement que ce soit devant la classe sur cette question. Pourtant, la Gauche Communiste a toujours revendiqué une continuité historique organisationnelle[9]. Le programme politique communiste s’acquiert à force de l’expérience des luttes de notre classe, des organisations qu’elle a vues naître et disparaître; des erreurs, échecs, et dépassements de ses erreurs et échecs. Pour se faire, elle a toujours revendiqué son histoire. Bien sûr, Controverses peut toujours nous répliquer :
« C’est cette compréhension – fort tardive, mais absolument nécessaire – qui est à l’origine de notre existence et de notre projet politique : faire prendre conscience de cette crise au sein de la Gauche Communiste et aider à la surmonter. Telle sont les raisons d’être de notre forum et des priorités que nous nous sommes assignées. »
Cependant, ces explications nous laissent sur notre faim.
Pour nous, peu importe que le projet de Controverses semblait à la base, dès le départ, un simple forum de discussion de membres ou d’anciens sympathisants (ou tutti quanti) du CCI, un « milieu » qui ne se voulait peut-être pas organisé (mais qui ne pouvait ultimement échapper à l’organisation de par son héritage politique et de par sa façon de concevoir l’histoire); peu importe, donc, ses réclamations, notre critique demeure la même : il faut revendiquer son héritage organisationnel![10]
En ce sens, maintenant, qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire pour un groupe qui est issu d’une organisation qu’il a défendue durant plus de X années[11] et qui claque la porte d’une telle façon? N’aurait-il pas été possible de faire prendre conscience de cette crise à travers l’organisation même qui l’a vue naître? N’aurait-il pas été préférable d’au moins essayer de s’organiser en fraction à l’intérieur du CCI pour se faire entendre, avant de prendre le large? Camarades, voyez le flou des questionnements pour la petite minorité révolutionnaire que nous constituons : imaginez maintenant ce que cela peut représenter pour l’ensemble du prolétariat qui n’a pas la même connaissance historique que vous, que nous.
Camarades, en effet, nous pensons que vous serez d’accord avec nous : l’organisation n’est pas une entreprise qu’on quitte et qu’on ouvre à sa guise selon son bon vouloir, sans plus d’explication. Pour la classe prolétarienne, cette façon de faire soulève doutes et questionnements. Si Controverses a quitté le bateau parce qu’il lui semblait trop « vieux », peut-être plus tellement en capacité de répondre au fort courant des luttes qui s’annoncent, alors son devoir n’était-il pas d’appeler à dissoudre l’organisation pendant qu’il était encore membre du CCI, histoire d’échapper des membres avant qu’ils ne se noient? Car c’est ce que fait Controverses présentement : il appelle à mettre un terme à la longue vie du CCI… Mais il le fait de l’extérieur de l’organisation en érigeant sa petite tente dans la nature du camp prolétarien, comme si c’était une franchise fluorescente du CCI. On cherche la continuité historique dans sa presse, sur son site, et elle nous apparaît floue. On cherche à comprendre qui vous êtes, et nous ne trouvons pas clairement[12]. Pour Klasbatalo, il est impératif que des explications plus larges aient lieu, et que Controverses affiche plus clairement son passé. On ne laisse pas le prolétariat dans une telle confusion suite à une scission, une fraction, ou une expulsion.
Marc Chirik écrivait à cet effet :
«Les scissions peuvent être à un certain moment la seule mesure qui s'impose pour sauvegarder au prolétariat son organisme de classe, son organisation politique. Pour que des scissions ainsi comprises aient lieu, cela ne peut et ne doit, en aucune façon, dépendre de la volonté et des caprices des personnalités mais exprimer une nécessité politique, se manifestant par des divergences programmatiques principielles parvenues à leur pleine maturation, en correspondance avec la situation objective. Unification et scission ne peuvent être examinées en soi mais se relient à la conception générale qu'on a sur la nature du parti.
Ceux pour qui la construction du parti est un acte de volonté et non en correspondance avec le processus de la formation historique de la classe, ceux-là opèreront des unifications et des scissions qui seront tout ce que l'on veut mais qui n'exprimeront pas un instant la vie de la classe, parce que se situant hors du processus réel. Aussi ces scissions et ces unifications se produiront dans la pleine nuit politique et n'apporteront aucun élément, aucun acquis, aucune expérience susceptibles d'être utilisés dans la lutte de classe et dans l'élaboration du programme de cette lutte. »
C’est suivant Marc Chirik – principal maître à penser du CCI – que, selon nous, Controverses devrait débuter l’élaboration de son bilan afin de dépasser l’organisation qui l’a vue naître. Nous pensons qu’effectivement la tâche de l’heure pour les petits groupes en marge d’organisations de la Gauche Communiste, pour les fractions et scissions issues de ces organisations du Milieu Politique prolétarien, est d’œuvrer à se regrouper autour de discussions programmatiques de premier ordre, d’échanger et de débattre en vue d’un regroupement politique synchronisé sur le cours historique ascendant dans lequel le prolétariat trempe actuellement. Notre tâche devrait être une interpellation mutuelle sur les questions de fond en vue de voir se détacher les éléments étrangers au programme internationaliste du prolétariat et afin par le fait-même, de se développer lentement en un corps politique organisé, capable de s’articuler dynamiquement autour des luttes que mène notre classe pour y injecter à petit feu son programme. Encore Chirik :
« Dans le présent, les révolutionnaires ne peuvent échapper à cette sclérose sectaire qu’en tendant au maintien et au développement de liaisons entre les groupes révolutionnaires de tous les pays, en entretenant les discussions les plus larges et les plus publiques, en bannissant l’esprit de tabou dogmatique, afin que l’esprit de critique vienne continuellement balayer la poussière accumulée et vivifier la pensée. Il n’y a pas d’autres voies de salut et il ne saurait exister de garantie absolue a priori. »
Lorsqu’une organisation perd un membre de la façon la plus brutale soit-elle, ou lorsqu’une scission se produit au sein d’une organisation, le devoir de ces deux organes nouvellement allégés est d’expliquer le comment du pourquoi à la classe, de mener une discussion ouverte devant celle-ci. [13]
Et c’est aussi pourquoi nous ne concevons pas forcément qu’il faille présentement s’unir – lire se regrouper – spécifiquement autour d’une organisation issue de la Gauche Communiste comme le sont la Tendance Communiste Internationaliste, le Courant Communiste International, ou le Parti Communiste International. Ces organisations agissent telles trois forteresses et pointer en direction d’une seule en proclamant aux minorités révolutionnaires (et se faisant au prolétariat) : « en avant » nous semble complètement a-historique et n’aide en rien à éclaircir les déboires de la GC, ni non plus son programme ultime qui est celui du renversement de la société bourgeoise. Ce n’est pas le temps de semer la confusion mais de l’extirper même si cette façon de procéder peut s’avérer un travail long et pénible.
Se regrouper, certes, mais comment ?
Nous saluons fraternellement le travail de nos camarades de la FGCI (et de l’ancienne FICCI) qui tentent depuis plusieurs années déjà au redressement du CCI, tout en appelant les forces de notre courant à se regrouper autour d’une organisation; mais nous divergeons cependant de leur méthode qui cherche à « octroyer » immédiatement le « contrat » du pôle de regroupement à la Tendance Communiste Internationaliste comme s’il s’agissait de l’entreprise la plus basse soumissionnaire d’erreurs et de régression programmatique.
De plus, pourquoi fermer la porte aussi rapidement à un groupe tel que Controverses plutôt qu’en faire une critique fraternelle? Mentionnant encore une fois Controverses, la FGCI écrit :
« Ils renoncent à la lutte pour le regroupement de la Gauche communiste, c'est-à-dire qu'ils refusent et même renoncent à la confrontation des positions politiques réelles qui sont exprimées et défendues par les groupes les plus anciens et importants, en particulier dans leur presse et intervention. Ces gens-là préfèrent bavarder dans des réseaux ou pire dans des "structures" informelles où l'on entre et l'on sort quand on veut et où chacun, comme dans les "auberges espagnoles", propose ou reprend, selon son humeur, sa pauvre "production".»
Il nous semble que c’est jeter l’anathème très rapidement, trop rapidement. Le temps est à la discussion, à l’ouverture des débats, aux critiques dures, certes, mais fraternelles. Les divergences autour de questions de second ordre n’empêchent pas forcément un travail commun, même s’il peut sembler l’alourdir dans le processus. En réalité, elles font partie du processus dialectique si cher aux marxistes. Qui plus est, comme ont pu le constater nos camarades de la FGCI, récemment, Controverses a su arrêter de produire son bilan pour intervenir directement dans la lutte contre la réforme Sarkozy qui a lieu depuis quelques semaines déjà avec un tract fort dynamique diffusé dans les mouvements en France. Et il a su en produire un second diffusé en Belgique, tout aussi pertinent. D’un forum libre et indépendant au départ, Controverses a su s’inscrire dans le processus réel des luttes en tant qu’organisation ! C’est peu dire, selon nous, l’intérêt que nous devons accorder à ce groupe présentement.
Aussi, nous pensons à contrario de nos camarades de la FGCI que le groupe Controverses, malgré peut-être ses difficultés à reconnaître son héritage programmatique CCIste, cherche tout autant que la FGCI au regroupement des forces issues de la Gauche Communiste. Plus important encore, nous pensons qu’il s’agit de notre devoir, en tant que groupe qui se revendique de l’héritage de Bilan, de la GCF, et des acquis du CCI, d’ouvrir une discussion avec celui-ci et en appelons nos camarades à faire de même, de la même façon que Chirik prenait contact avec tous les camarades de la GC en 1968. Nous divergeons donc grandement sur leur interprétation du groupe Controverses. Il n’est pas l’heure d’envoyer paître des militants ou des groupes avec lesquels nous partageons une analyse programmatique !
Par ailleurs, cela fait quelques années que nous entretenons d’excellents contacts avec la FICCI (d’ailleurs elle aussi scissionnée dernièrement), et nous ne cachons pas notre sympathie à leur égard, que ce soit la nouvelle FGCI ou la FICCI (qui ne semble plus très active malheureusement). En ce qui nous concerne, nous pensons qu’il s’agit d’un des groupes les plus sérieux avec une des plus grandes volontés à la discussion et à la clarification programmatique. Nous n’avons pas l’expérience historique de la plupart des groupes du Milieu Politique prolétarien, mais la Fraction (la FICCI unie) a su ouvrir un échange avec nous, en sachant très bien nous critiquer durement lorsqu’il était nécessaire de le faire. De notre côté, nous avons su digérer ces critiques – en gardant toujours en vue la méthode dialectique, processus cognitif de la lutte de classe – tout en continuant une correspondance fraternelle avec ceux-ci. Elle a aussi su nous empêcher de glisser vers des voies de garage, dans notre désespoir à vouloir à tout prix briser l’isolement, à regrouper autour de nous, à s’activer dans notre classe. Effectivement, aucun groupe n’est à l’abri d’erreurs et d’errements politiques, surtout dans l’état actuel des choses. Bref, le fait est que la FICCI (les deux scissions) s’est donnée pour mission, tout comme Klasbatalo, de contribuer au regroupement des forces issues de la GC[14].
Oui mais encore, de quelle façon ? Concernant le sempiternel regroupement autour de la TCI, la FGCI écrit :
« Enfin, dans cette situation du camp prolétarien dans laquelle ces deux premiers courants ("Bordiguisme" et CCI) ne sont plus en capacité de faire face à leurs responsabilités historiques comme pôle de référence et de regroupement, la Tendance Communiste Internationaliste (ex-BIPR), seule organisation qui serait en capacité réelle d'occuper et d'assumer cette responsabilité, tend à n'en pas saisir toute l'importance et toute la signification historique, préférant en rester à ces certitudes immédiates. Certes, cette organisation réussit par moment et en certaines occasions à s'imposer comme ce pôle, au point de regrouper directement autour d'elle - ce que nous saluons et appuyons -, mais elle ne réussit pas à appréhender toute la dimension d'une politique déterminée de "regroupement" autour d'elle, se limitant justement à n'en voir la finalité que comme une adhésion immédiate. Du coup, elle tend à sous-estimer, voire à ignorer, les autres courants du camp prolétarien et l'indispensable lutte politique contre les dérives opportunistes qui s'y développent, n'y voyant, à son tour, elle-aussi, que des polémiques stériles. Pourtant combien d'éléments révolutionnaires en recherche de clarification et de cohérence politique - ils seront encore plus nombreux demain avec la crise et les luttes ouvrières inévitables qui se développent - pourraient ainsi se référer et s'orienter parmi les positions et groupes si la TCI assumait toutes les dimensions du rôle que l'histoire lui offre aujourd'hui. Quel pas en avant pour le regroupement ! »
Camarades, pourquoi elle et pas une autre? Parce qu’on en a décidé ainsi? Il nous semble qu’au contraire, l’ancien BIPR, de par son simple nouveau nom de « Tendance Communiste Internationaliste » semble avoir politiquement considérablement régressé en s’autoproclamant « tendance »! On est loin de la clarté ici. N’en déplaisent à nos camarades italiens, la Gauche Communiste n’est pas une tendance mais bien un courant politique produisant des tendances (italienne partidiste, germano-hollandaise conseilliste, française synthétique).
On ne décide pas suivant la simple volonté d’une poignée de militants quelle organisation devrait être et agir comme pôle de regroupement, ni non plus on ne décide quel groupe sera le futur parti. C’est d’ailleurs une incroyable faiblesse de la part d’organisations se revendiquant du marxisme de pouvoir s’affirmer ou non parti ou embryon du parti. C’est grâce à une discussion autour du renforcement et de la clarification du programme communiste que se formaliseront les cadres du futur parti prolétarien. Pour Klasbatalo, c’est une vérité fondamentale toute simple que seule l’Histoire, autour de profondes discussions au sein des minorités révolutionnaires, saura déterminer si la TCI sera ou non le prochain pôle de regroupement, le prochain parti de notre classe. S’il n’était que de la volonté des militants de proclamer le parti de classe, alors à quoi bon attendre le prolétariat pour faire la Révolution? Nous n’aurions qu’à nous armer, à prendre le maquis, à s’activer dans la lutte armée minoritaire si propre aux organisations staliniennes (véritables liquidateurs du marxisme)…
Camarades, c’est par un programme clair, synchronisé sur la lutte que mène au quotidien la classe dont nous sommes issus; par une capacité croissante, organisée en un véritable corps politique, d’articuler et d’insuffler la réponse historique des intérêts du prolétariat au sein-même de la classe prolétarienne; par le mouvement dialectique d’une classe sans moyen de production à se tourner dans notre direction pour chercher ses mots d’ordre; c’est tout ça qui définira finalement quel – et comment – sera le parti communiste internationaliste.
Le fait est que pour les CI-K actuellement, non seulement la TCI n’a pas la volonté d’accomplir ce rôle (et c’est elle-même qui ne cesse de l’affirmer) mais nous pensons que, pire encore, elle n’est pas en mesure de le faire. Cette organisation, tout en gardant le cap sur les positions de classe, nous semble floue; on ne sait jamais trop ce qu’est le bureau, qu’est-ce qu’il fait, quelle est son intervention dans la classe. L’existence de son ancien comité de liaison (devenu depuis peu bureau international) semble vivre au gré de la volonté de ses militants avec une intervention ici, une là. De fait, à notre connaissance, la seule intervention publique de l’ancien comité de liaison du BIPR fut dans sa « mise au point » à notre égard.
Dans le point 3 du texte Le Bureau International pour le Parti Révolutionnaire devient la Tendance Communiste Internationaliste, il nous est dit :
« Notre orientation a toujours été en direction de la classe ouvrière dans son ensemble plutôt que vers les groupes politiques existants, aussi proches fussent-ils. »
Nous demandons ainsi à nos camarades, n’est-ce pas là se concevoir comme un parti en soi?
Ensuite, toujours dans le même point, nous sommes contraints de lire cette ânerie qui sort dont on ne sait où:
«Même si nous avons eu de temps en temps des échanges polémiques avec d’autres groupes, notre objectif n’était pas simplement de réunir des groupes d’intellectuels, mais de construire des organisations réelles qui visaient à trouver des moyens de se lier avec les luttes des travailleurs et des travailleuses sur le terrain afin de maintenir une continuité de la conscience de la lutte pour les prochains combats. C’est pourquoi nous continuons à préconiser la nécessité d’organes du parti organisés dans la classe, tels les groupes d’usines ou les groupes sur les lieux de travail et les groupes territoriaux qui regroupent des militants et des militantes dans le même quartier. »
Qu’est-ce qu’une avant-garde révolutionnaire sinon un groupe d’ouvriers et d’intellectuels, et dont les ouvriers qui en font partie sont eux-mêmes des intellectuels? Est-ce réactionnaire et anti-ouvrier d’être intellectuel? N’y a-t-il pas des salariés, des prolétaires, qui sont à la fois des intellectuels et / ou produisent directement un travail intellectuel? Faut-il boire de la bière et jouer au football pour être ouvrier? Qu’est-ce qu’une organisation réelle pour la TCI? Un groupe de deux personnes au Canada et un groupe qui publie un journal de façon très irrégulière en France? Mais éclairez-nous sur cette question, nous sommes confus. Et la continuité de la conscience, n’est-ce pas dans le travail intellectuel et les organisations que le prolétariat met de l’avant qu’elle se maintient, s’articule, et se développe? Également, dans les échanges entre groupes, dans l’analyse des luttes de notre classe, dans l’analyse aussi d’organisations les ayant précédé? Les organisations – en fait, plutôt le programme qu’elles ont su clarifier – ne sont-elles pas la poursuite d’une œuvre historique plus grande qu’elles-mêmes? Et la simple mise en avant de groupes d’usines, de groupes sur les lieux de travail, de groupes territoriaux et de quartier nous semble plus près du travail d’anarchistes que de celui du travail partidiste.
Continuons. Dans le résumé des décisions prises du même texte, la TCI nous écrit comme si c’était une vérité fondamentale :
« Le cadre de base et l’approche définie dans nos documents d’origine reste inchangé. Nous devons toutefois reconnaître que le Bureau est allé au-delà de sa composition originale et que, puisque c’est le cas, comme nos documents initiaux le prévoyaient, nous devons évoluer progressivement vers une activité plus centralisée à mesure que le Bureau s’élargit. C’est pourquoi nous avons décidé que le Bureau doit devenir l’organe centralisé de coordination de notre organisation internationale. »
Au-delà de sa composition initiale? Nous tenterons de garder notre sérieux pour ne pas rire. Aussi, si on suit cette logique, parce qu’il y a une quinzaine d’années les documents initiaux prévoyaient une expansion de l’organisation, il lui faut maintenant – en septembre 2009, alors qu’aucune lutte ne menace réellement le capital comme c’est le cas depuis l’hiver 2010 passé – évoluer vers une activité plus centralisée à mesure que le Bureau s’élargit. Gardons encore notre sérieux. Alors, si nos camarades de la TCI pouvaient à présent nous dire à quoi ressemble ce centre, et en quoi il est si différent de ce qu’il était, ce serait très éclairant.
Dans cette veine, nous demandions à nos camarades de la FGCI, que faire au Canada avec des militants en quête de clarification politique et programmatique approchant les CI-K? Les envoyer vers le Groupe Internationaliste Ouvrier, filiation canadienne de la TCI, alors que ce groupe représente pour nous un élément problématique qui ne semble pas avoir un quelconque problème à jongler occasionnellement avec l’opportunisme? Du même coup, le cadre organisationnel que l’ancien BIPR a mis sur pied et dans lequel il se trouve – c’est-à-dire la préséance des organisations nationales sur l’organisation internationale, sorte de fédéralisme mutant[15] et inquiétant dans son impossibilité pratique à pouvoir intervenir efficacement lors de difficultés rencontrées au sein d’une de ses sections nationales – empêche la prise en charge plus « partidiste », plus centralisée, des militants adhérent à sa plateforme internationale. Pour nous, cela pose un énorme problème; et un problème pas seulement théorique comme certains de nous l’ont expérimenté au cours de notre passage au sein du GIO.
Maintenant, dans la décision numéro huit :
« Nous avons déjà fait la preuve de notre préparation théorique et la dernière phase de la crise n’a pas encore donné naissance à de nouveaux groupes de la classe ouvrière, ce qui aurait pu changer nos perspectives. Il a donc été convenu qu’il serait prématuré de tenir une conférence internationale dans un avenir prévisible. Au lieu de cela, notre priorité doit continuer à être le travail en direction de la classe ouvrière dans son ensemble, car c’est seulement en travaillant dans cette direction que nous apprendrons à mieux contribuer au futur parti du prolétariat. »
Mille soupirs! Il y a eu de nouveaux groupes issus du prolétariat : toutefois, la TCI n’a pas la volonté (ou l’intérêt, ou les deux) d’entrer en discussions avec ceux-ci. Elle discute avec elle-même en pensant pouvoir un jour accoucher de son propre parti. En travaillant seule dans la direction du prolétariat, la TCI nous apprend qu’elle pourra apprendre à mieux contribuer au futur parti. Est-ce que Klasbatalo! est le seul groupe à avoir de la difficulté à comprendre cette formulation, qui semble sortie de nulle part? C’est ainsi que la TCI nous apprend que, en ce qui la concerne, l’époque du regroupement des forces communistes est terminée.
Par ailleurs, nous n’affirmons pas non plus que la TCI ne puisse pas être un pôle de regroupement. Seulement, elle ne peut pas l’être pour le moment car elle est repliée sur elle-même et il s’avère impossible, pour nous, de discuter avec sa filiation canadienne qui nous accuse, une fois l’an, de mener une campagne systématique de dénigrement à son égard.
Maintenant, oui nous pensons que l’heure est au regroupement mais posons au préalable ces trois questions devant nos camarades, toutes organisations de la Gauche Communiste confondues : sur quelle base se regroupe-t-on? Quel groupe semble s’inscrire réellement dans le processus des luttes que mènent notre classe et quel groupe semble étranger à ce processus? Qui actuellement, dans les organisations ayant un passé Gauche Communiste, ne peut plus réellement se revendiquer appartenir au Milieu Politique prolétarien (et ipso facto, est-ce que des divergences quant à la nature de ce propos pourraient automatiquement empêcher un travail conjoint)?
Les acquis politiques et la voie vers le regroupement
On peut actuellement analyser le mouvement révolutionnaire de la même façon qu’Internationalisme le faisait en 1947 :
« C'est en pesant chaque mot et non par goût de la phraséologie journalistique que nous disons que le mouvement ouvrier n'a encore jamais vécu des heures aussi sombres que celles que nous traversons. Il serait peut-être plus exact encore de dire qu'il n'existe pas de mouvement ouvrier présentement. Les partis socialistes et staliniens ont depuis longtemps cessé de représenter une tendance du mouvement ouvrier pour n'être que des formations politiques de la bourgeoisie. Le mouvement syndical ne représente pas davantage une organisation unitaire de défense des intérêts économiques immédiats du prolétariat. Les syndicats sont aujourd'hui complètement intégrés à l'État, ils sont un appendice de l'État avec la fonction de faire accepter, par la classe ouvrière, les mesures d'exploitation et d'aggravation de leurs conditions de misère. Les récents mouvements de grève ont mis en évidence que ce moyen classique de lutte des ouvriers a cessé d'être l'arme exclusive du prolétariat, a perdu sa nature absolue de classe et peut aussi servir de moyen de manoeuvre d'une fraction politique capitaliste contre une autre, d'un bloc impérialiste contre un autre et finalement dans l'intérêt général du capitalisme.
Dans l'ensemble, la classe ouvrière - désorientée et totalement impuissante - sert actuellement de masse de manoeuvre à différents partis et cliques politiques de la bourgeoisie.
Les petits groupes et groupuscules de révolutionnaires sont absolument sans liens physiques avec la classe et leur influence est nulle. N'est-il pas plus tragique que comique de voir ces groupes se prendre au sérieux quand ils parlent de leur action des masses et dans les masses, quand ils s'agitent et sont agités dans le vide et ne s'aperçoivent pas que toute cette agitation se passe et se fait en dehors des masses, en marge de la classe ?
Mais alors que reste-t-il à faire aux militants révolutionnaires ? N'ont-ils, en tant que révolutionnaires, aucune tâche à faire, ni aucune possibilité de s'en acquitter ?
Avant de répondre à ces questions et pour pouvoir répondre d'une façon concrète positive, il est indispensable de reconnaître préalablement la réalité objective du moment présent, reconnaître sans réserve l'inexistence effective, dans l'immédiat, du mouvement ouvrier et de renoncer catégoriquement à la pratique du bluff, à la prétention de vouloir jouer immédiatement et à tout prix un "rôle" de guide et dirigeant, et s'obnubiler de son importance.
Les conditions et les facteurs qui ont déterminé la plus profonde défaite du prolétariat et la nuit historique de la période présente dans laquelle a sombré le mouvement ouvrier révolutionnaire ne sont aucunement épuisés. Ils continuent encore à agir et à dominer le cours présent. Rien ne laisse malheureusement escompter une modification du cours avant la généralisation de la prochaine guerre impérialiste. Peut-être même que la catastrophe humaine que sera la prochaine guerre mondiale est-elle nécessaire pour déterminer le renversement du cours et conditionner la réapparition du prolétariat et la reprise de sa mission et de sa lutte révolutionnaire.
Dans la période présente les révolutionnaires ne peuvent prétendre exercer une influence directe et efficace sur les événements. Ils ne peuvent que représenter des îlots, des hommes allant consciemment et volontairement contre le courant, se trouvant non pas volontairement mais forcément isolés des grandes masses du prolétariat. Leur tâche dans le présent n'est pas celle de l'agitation mais celle de la propagande des idées, nécessairement limitée à des couches restreintes. Leur principal effort doit porter sur le réexamen critique des notions et des conceptions qui ont servi de fondements du programme de la révolution et de l'Internationale Communiste, à la lumière de l'expérience des trente dernières années, riches en actions révolutionnaires et défaites profondes.
C'est dans le plein accomplissement de ce travail que les groupes révolutionnaires s'acquitteront réellement de la tâche qui est la leur et contribueront efficacement à l'élaboration du programme qui permettra demain au prolétariat, à la reprise de ses luttes, de s'en servir comme l'arme décisive pour le triomphe de la révolution et l'édification de la société socialiste. Le programme n'est pas un composé de dogmes qu'une fois donnés il ne reste qu'à vulgariser et à propager. C'est une oeuvre constante nécessitant son continuel développement (et dépassement) sur la base de l'expérience vivante de la lutte de classe. La prise de conscience, le travail sur la matière, donnée par l'expérience, en vue de l'enrichissement du programme restent les raisons fondamentales de l'organisation de l'avant-garde ; et c'est dans ce sens et sur cette base uniquement qu'on doit concevoir la formation des cadres. »
Marco (Marc Chirik), PROBLEMES ACTUELS DU MOUVEMENT REVOLUTIONNAIRE INTERNATIONAL, janvier 1947
Que dire de plus ? Impossible même de tronquer et de raccourcir cette citation qui nous semble dater d’hier tellement la conjoncture est, actuellement en 2010, pratiquement à peu de choses près la même ! Chirik écrivait pourtant ceci il y a plus de soixante (60) ans ! Nous ne pouvions la passer sous silence, et c’était notre devoir de la remettre à l’ordre du jour.
Bien entendu, en 60 ans, il y eût des progrès et changements.D’abord, la constitution de la plus importante organisation Gauche Communiste de tous les temps, c’est-à-dire le Courant Communiste International qui a su également produire la plus importante théorie programmatique, malgré quelques inévitables erreurs au cours de son apprentissage organisationnel ; malgré également des difficultés et erreurs internes notoires (celles-là probablement très très évitables) ; malgré un cours historique des luttes faibles (mais pas inexistantes comme le laisse entendre Controverses dans son texte).
Cette organisation a également produit d’innombrables départs plus ou moins intéressants à rappeler tellement ils ont eu lieu dans des crises paranoïaques intenses ; elle a aussi accouché d’organisations de tendances diverses (du conseillisme jusqu’au bordiguisme) ; et nettement influencé les groupes d’aujourd’hui, qui revendiquent un héritage Gauche Communiste, tel Klasbatalo. Le bagage programmatique qu’elle a produit dans ses plus belles années demeure d’une luminosité éclatante pour le prolétariat, dans sa synthèse des fractions de gauche issues de l’Internationale Communiste qui se sont développées de façon plus autonome, plus éparses, après la dégénérescence de cette dernière. Avec Bordiga, c’est probablement, pensons-nous, une erreur de n’avoir pas plus bataillé – organisés solidement en « corps de fractions » de Gauche – au redressement de ce point d’assise à l’origine socialiste, de l’avoir déserté aussi rapidement dans une indifférence plus ou moins généralisée. Nous en ressentons encore aujourd’hui les effets : la tendance qu’a la Gauche Communiste à capituler aussi rapidement dans les discussions, devant la moindre divergence, laissant éclater – sans ne plus voir le tragique de la chose – les organisations sur la base de particularisme programmatique incompréhensible pour le commun du prolétariat en semant la confusion dans le processus.
C’est beaucoup plus facile ainsi : on ne se trompe plus, on ne discute plus !
En soixante ans, malgré tout, malgré ce narcissisme organisationnel qui semble affecter la plupart du Milieu, l’apport programmatique laissé par les groupes est d’une importance capitale ! Avec la FGCI, nous ne pouvons renier la richesse de cet apport : la continuité historique des principales organisations bordiguistes qui ont formé un pôle capital et su préserver leur héritage programmatique (malgré les divergences importantes que nous entretenons avec ceux-ci). Le CCI qui a vu le jour, le BIPR qui s’est formalisé et qui a donné naissance à la Tendance Communiste Internationaliste, laquelle cherche aujourd’hui à se centraliser pour intervenir plus efficacement dans les luttes. Que nous soyons en accord ou non avec ces acquis, le fait est qu’ils sont bien présents et prennent leurs racines, plus ou moins solidement, au sein de notre classe, dans l’ensemble du prolétariat.
Le fait est que l’histoire semble actuellement se répéter. Effectivement celle-ci possède ses cycles qui se reproduisent lorsque l’ensemble de la société toutes classes confondues se voit bloquée. Le capitalisme n’arrive pas à trouver la voie vers la guerre généralisée et subit crises économiques par-dessus crises économiques. Et le prolétariat, dans l’antagonisme qui l’anime face à la bourgeoisie, n’arrive pas à s’affirmer comme classe, subissant coups après coups les assauts répétés de la bourgeoisie qui cherche à trouver l’ultime expédient à sa crise.
Citons encore une fois le camarade Roche :
« La classe ouvrière a subi de multiples transformations structurelles au cours de deux siècles d’industrialisation. Artisan, mineur, sidérurgiste, métallurgiste, employé de bureau, informaticien, le prolétaire reste prolétaire. Constituée de moins d’ouvriers industriels, d’une noria d’employés flexibles des services, de cadres massivement prolétarisés, la classe ouvrière, ou disons travailleuse, garde toutes ses potentialités révolutionnaires presque un demi-siècle après le chambardement inattendu de 1968. L’observateur superficiel ne voit pas plus loin que la ligne bleue des Vosges, mais d’importantes grèves ouvrières ont continué à inquiéter la bourgeoisie au niveau international pendant plus de trois décennies, grèves des mineurs anglais, mouvement massif des ouvriers polonais en 1981, grève des cheminots en France au milieu des années 1980, puis 1995, etc. »
Les luttes se sont toujours poursuivies à plus ou moins larges échelles, avec plus ou moins de potentialités historiques, à contrario de ce que Controverses semble affirmer. Dans le mode de production capitaliste, il y a naturellement – dans la nature intrinsèque antagonique qui la remue – des périodes d’attaques généralisées comme c’est le cas présentement, et des périodes qui garantissent une plus grande stabilité et permettent la reprise du cycle d’accumulation, toujours inscrites dans le processus historique des luttes de classes qui doivent mener de façon transcroissante à l’ultime guerre des classes. Notre rôle en tant que révolutionnaires est de suivre le cours de ses luttes et de nous inscrire dans celui-ci, pour justement insuffler la transcroissance des luttes prolétariennes. Il incombera donc au futur parti communiste internationaliste la tâche de cristalliser (en même temps que d’approfondir) le processus de transformation de la classe en soi en classe pour soi, consciente de ses intérêts révolutionnaires. Il est de notre ressors de savoir tirer adéquatement les leçons historiques des défaites du prolétariat pour qu’elles se transforment ultimement dans le triomphe communiste. Camarades, dans ce processus, il n’y a aucune place aux approximations du cours historique.
Ébauche d’une conclusion
Pourquoi vouloir à tout prix faire de la TCI ou du CCI un pôle de regroupement? Rappelons que le CCI fait présentement les yeux doux à l’anarchisme. Du côté de la TCI, pourquoi est-elle autant repliée sur elle-même? Elle expose très peu son fonctionnement devant la classe, si bien qu’il nous est difficile de concevoir sa pratique dans les luttes. Elle tente depuis plusieurs années de taire les divergences des membres qui la quittent en gardant le silence « pour ne pas créer de polémique ». Est-ce là le rôle de l’organisation de taire les scissions devant la classe pour empêcher les polémiques? N’y a-t-il pas danger, au contraire, de semer l’ambiguïté dans le prolétariat? Pour répondre à nos camarades de la FGCI, le pôle de regroupement ne serait-il pas censé être un produit de larges discussions au sein du Milieu Politique prolétarien? Un produit de la convergence d’individus et de noyaux se regroupant autour de profonds questionnements, autour de discussion visant à dénouer les nœuds programmatiques?
Aussi, les principales difficultés auxquelles l’ensemble des groupes se revendiquant de l’héritage Gauche Communiste assistent depuis la moitié des années quatre-vingt, comme s’ils étaient impuissants, est à une large retraite du plan organisationnel et à une pauvreté théorique croissante de sa réponse à la conjoncture historique. Comme s’ils n’étaient pas facteur actif de cette crise des « claquages de porte » en série et éviscération programmatique, les principaux groupes issus de la Gauche Communiste, au lieu de tenter de dresser un bilan de leurs échecs et échecs communs, se campent de plus en plus sur leurs positions en défendant leurs erreurs et en les revendiquant presque comme particularisme programmatique (par exemple, le CCI et l’affaire JJ; feu le BIPR et la suite d’échecs avec ses groupes en rapprochement ainsi que la stagnation – si ce n’est pas le recul – du GIO et de B&P). De cette façon, ce n’est plus un pied qui trempe dans le sectarisme politique mais les corps organisationnels au grand complet. Nous tendons à partager à cet effet l’analyse de Controverses et de la FGCI. Qui plus est, le CCI et la TCI (feu le BIPR) se comportent de plus en plus comme le fœtus du nouveau parti. Le changement de nom du Bureau International pour le Parti Révolutionnaire est patent à cet effet[16].
Par ailleurs, tout en partageant une bonne partie des conclusions de Controverses, nous ne pensons pas que ce bilan soit « sans appel ». En effet, bien qu’il soit une importante contribution à l’éclaircissement de la situation présente au sein des groupes issus de la Gauche Communiste, nous pensons qu’il faut mettre un peu plus les choses en perspective et qu’il y a place aux discussions concernant ce bilan, bilan que nous jugeons actuellement indispensable pour la formation du regroupement de nos forces qui partagent un objectif commun : la formation éventuelle d’un parti de classe internationaliste comme futur « guide » de la révolution. La principale force de l’analyse de Controverses est justement la tentative qu’il fait de produire une analyse, un bilan, des trente dernières années. Controverses se veut ipso facto l’expression de questions qui accablent l’ensemble des organisations du camp prolétarien, et qu’elles ne semblent pas vouloir se poser. Aussi ce bilan, loin d’être « sans appel » se veut plutôt l’appel aux bilans.
Maintenant, que nous reste-t-il à faire en tant qu’élément révolutionnaire marxiste?
Contribuer à l’élaboration d’un état des lieux général de la Gauche Communiste ou se camper sur ses propres positions en n’y voyant que du feu; en espérant peut-être que la débâcle se résolve d’elle-même? Demeurés des « électrons libres » – qui s’agitent ou théorisent des questions de façon autistique, sans s’inscrire dans le processus réel des luttes – d’une organisation plus cohérente, mieux articulée, plus en mesure de répondre à la montée des luttes?Ou tenter de se regrouper autour des questionnements nécessaires, et inévitables; de se regrouper autour même des divergences qui posent ces questionnements et tentent de les résoudre de façon dialectique, marxiste, vivante (dans l’esprit des fractions fidèles aux principes mêmes de notre héritage programmatique)?
Rappelons en dernier lieu qu’à l’origine, la Gauche Communiste se concevait pratiquement comme un centre en soi avec des divergences plus ou moins importantes : un regroupement de toutes les fractions de gauches de l’Internationale Communiste appelées à discuter entre elles.
Aussi, pour les communistes internationalistes – Klasbatalo!, il va de soi que la tâche actuelle des groupes qui partagent le même héritage Gauche Communiste doit consister à resserrer nos liens internationaux – et certainement même à se réconcilier – autour du programme révolutionnaire qui est celui d’une classe à laquelle nous appartenons, à le clarifier davantage à la lumière des nouvelles luttes historiques grâce à la discussion et à l’ouverture de débats; et ainsi à se voir se préparer à le ré-insuffler au sein du prolétariat lorsqu’il y aura guerre des classes...
Les communistes internationalistes – Klasbatalo!
Novembre 2010.
Annexe 1 :
Il est minuit dans la Gauche Communiste
(Controverses)
Annexe 2 :
Le camp prolétarien a-t-il fait faillite?
(Fraction de la Gauche Communiste Internationale

[1] Par ailleurs, même si les divers corps de la Gauche Communiste sont moribonds, certains de ceux-ci semblent « victimes » de spasmes qui laissent entrevoir la volonté d’un dernier effort pour briser l’isolement en vu probablement de transmettre leur héritage (la moyenne d’âge des camarades ayant sensiblement augmenté), afin de reprendre la voie des discussions. Notons d’emblée à ce sujet que le Parti Communiste International (Le Prolétaire), dans les dernières organisations importantes issues de la Gauche Communiste, a toujours su répondre à nos courriels de la façon la plus honnête et la moins contournée, même si la plupart du temps cela s’avérait une fin de non-recevoir de la part de celui-ci, véritable blindé gardant ses positions intransigeantes. La critique récente de nos positions de base est un premier pas dans cette direction. Voilà déjà pour le PCI et voilà déjà aussi pourquoi selon nous l’heure est à baisser les boucliers et à reprendre la voie des contacts et discussions entre nous.
[2] On peut facilement faire un parallèle à cet effet avec le CCI qui semble s’être profondément enfoncé dans la paranoïa et l’autisme organisationnel au cours des dernières décennies.
[3] Affrontement de classes comme c’est la tendance présentement. Nous assistons depuis la crise des subprimes à une attaque en règle de la bourgeoisie contre le prolétariat.
[4] Comme ce fut le cas par exemple de la GCF et Internationalisme, malgré sa fuite paranoïaque pour préserver ses cadres d’une éventuelle troisième guerre mondiale. Le corpus théorique incroyable qu’elle a su produire pendant presque 10 ans ont jeté les bases sur lesquelles s’est édifié le CCI.
[5] Et passons sur le fait qu’à subsister ainsi, elles heurtent fortement l’environnement duquel elles sont issues et dans lequel elles évoluent, c’est-à-dire notre classe, le prolétariat.
[6] Le CCI a subi de nombreuses crises au cours des trois dernières décennies qui chaque fois semblent l’avoir considérablement ébranlé. L’affaire JJ est certainement la plus grave de celle-ci. De fait, le CCI est l’organisation qui a enfanté le plus de groupes marginaux depuis trente ans : Le Groupe Communiste Internationaliste (si on peut dire), Perspective Internationaliste, la FICCI, et Controverses. Il faut aussi noter que le CCI est de plus en plus silencieux de répondre à ses critiques.
[7] La TCI, du temps du BIPR, a subi plusieurs échecs au cours des dernières années. Rappelons l’affaire des « communistes radicaux d’Ukraine », du LAWV, du départ du Circulo de Comunistas Internationalistas sans même une notice pour expliquer sa disparition de ce groupe membre. Passons aussi sur le silence incroyable dont il a fait preuve concernant l’IOD et sa récente réponse dont le caractère politique cherche encore à émaner. D’ailleurs, n’en déplaise à celle-ci, nous considérons toujours que notre contribution au sein du GIO fait de nous, de façon relative et non pas absolue, une espèce de scission de la TCI : du moins, une sorte de mutation exogène. De toute façon, la TCI semble habile à former des mutants.
[8] Le trotskisme en est un exemple flagrant en appelant le prolétariat à monter dans la charrette de la bourgeoisie du Front Populaire pour se faire massacrer au nom de la république.
[9] Rappelons comment la GCF et la FFGC clouaient au pilori les prétentions de Castoriadis à vouloir innover alors qu’il ne faisait que repiquer les vieux textes de la GCI. D’ailleurs la plupart de la critique de Controverses (et de la nôtre), revue sous la lunette de la conjoncture présente, se retrouve aisément dans les vieux numéros d’Internationalisme de 1945 à 1952.
[10] On se souvient qu’ils ont signé un document « pro-révolutionnaire » de Perspective Internationaliste, dont le contenu était complètement opportuniste, avec tout un tas de groupes qui n’ont rien à battre de l’héritage programmatique marxiste.
[11] Les principales organisations présentes issues de la GC ont toutes su se préserver malgré un cours historique difficile durant les dernières décennies. Les luttes de classes sont l’oxygène de l’organisation. Sans cet élément, c’est un reflux théorique auquel on risque d’assister.
[12] Lorsque nous, feu les communistes internationalistes de Montréal, avons démissionné du GIO, nous avons expliqué les raisons de notre départ, même si nous n’étions que des sympathisants fortement actifs. Peu importe si nous n’avions pas l’énorme bagage théorique de la GC, c’était notre rôle d’entrer en communication avec les autres groupes, d’expliquer la situation : même si nous avons alors été targué de semer la confusion (au contraire selon nous), de mener des ‘petty debat’. Entendu que nous avons fait des erreurs : mais qui en travaillant n’en commet aucune ?
[13] À ce sujet, nous renvoyons aussi le lecteur à la récente scission de la TCI avec l’Instituto Onorato Damen. Non seulement la TCI a-t-elle tardé à répondre à cette scission mais il nous semble qu’elle y ait été contrainte par la force des choses. Aussi nous dit-elle dans sa mise au point : « Nous avions décidé de ne pas commenter la naissance de cet institut afin d’éviter des polémiques inutiles. » Mais quelle polémique peut-elle être plus utile que d’expliquer un évènement d’une telle importance que celui qui mène à une scission ? À quoi rime cette omerta de la part de nos camarades italiens ?
[14] Bien entendu, à ce sujet, nous déplorons la récente scission de la FICCI et appelons nos camarades de la FGCI et de la FICCI à rouvrir la discussion.
[15] Cependant, nous ne pensons pas qu’un fédéralisme plus classique serait préférable. Le besoin d’organisation du prolétariat au niveau mondial se doit d’être centralisé pour coordonner efficacement la chute de la bourgeoisie dans tous les pays.
[16] Les anciens communistes internationalistes de Montréal ont également changé de nom mais pour les raisons suivantes : depuis les derniers mois, la constitution de notre groupe, plus ou moins informelle au départ (notre groupe s’étant avant tout formé en vue de répondre au BIPR et à son groupe le GIO, d’où le nom plus ou moins informel de CIM), s’est vu se renforcer; également nous ne sommes plus limités à la ville de Montréal en tant que groupe d’internationalistes. Nous sommes conscients qu’il s’agissait-là d’une contradiction.

mercredi 1 décembre 2010

Correspondance avec un prolétaire en recherche de voie révolutionnaire

Voici la correspondance que nous avons eue avec un contact habitant hors de Montréal. La discussion traite de sujets généraux comme la révolution, l’organisation du prolétariat ou encore le capitalisme. Évidemment, il y a plusieurs divergences entre nous sur de nombreux sujets. Mais, cette correspondance reste une très bonne discussion fraternelle entre un prolétaire en recherche de voie révolutionnaire et un noyau d’avant-garde communiste. Nous ne pouvons qu’espérer que ce type de discussion se multiplie au sein de la classe ouvrière.

Notre réponse en rouge suit chaque paragraphe du texte de notre contact.

Salut à vous tous,

Le temps file si vite, il y a déjà plusieurs mois qu’on s’est rencontré. J’ai été très occupé ces derniers mois (pas par le travail salarié rassurez-vous) mais j’ai pris quelques moments pour pas que vous pensiez que je ne sympathise plus avec votre mouvement.

Je tiens d’abord à préciser que ma vision de l’organisation mondiale idéale pour notre futur est toujours en constante évolution. Je suis bien en accord avec les communistes internationalistes sur bien des points : décadence du capitalisme, exploitation du prolétariat par la classe dominante, syndicat nuisible, divisions de la classe ouvrière (selon l’ethnie, le travail, l’orientation sexuelle, etc.) Le but de mon message est de mieux comprendre votre position et vous exposer quelques réflexions.

Tout d’abord, faut dire que j’ai été surpris du peu de force présente dans votre organisation. Je croyais que c’était un mouvement de masse important de plusieurs milliers de personnes mais loin de là. Personnellement, je crois que le soulèvement des masses de prolétaire ne pourra pas se faire tant et aussi longtemps qu’il n’y aura pas de concession de fait par les divers factions de la gauche communiste pour les unifier dans une sorte de comité révolutionnaire chargée de menée à bien la révolution prolétaire. Ce que je cherche seulement à exprimer c’est que énormément de gens de diverses écoles de pensée souhaitent le renversement du capitalisme mais ils sont tellement divisés dans les nombreux groupes de protestation que leurs effets est nul. Les gens ont des raisons bien différentes de vouloir participer à la révolution et à la destruction du système totalitaire marchand qui nous contrôle aujourd’hui.

Bien sûr nous ne sommes très peu nombreux et ce, bien malgré nous! Nous ne sommes qu’un petit noyau de militants révolutionnaires mais, évidemment, comme nous voulons construire le parti international et internationaliste, nous voulons grossir nos rangs, aller chercher les éléments révolutionnaires de notre classe et créer ce que tu appelles « un mouvement de masse ». Il est certain que le facteur « nombre » est important dans le processus de la révolution communiste, ce sera le prolétariat dans sa majorité qui fera la révolution. Mais dans des périodes comme aujourd’hui de fin de contre-révolution et de préparation de la révolution, le facteur « qualité » est tout aussi sinon plus important. Ce facteur « qualité », c’est le programme politique des organisations du prolétariat que les luttes et expériences passées lui ont légué. Malheureusement, aujourd’hui seules les faibles forces des organisations de la gauche communiste revendiquent ce programme politique de la classe ouvrière. Mais pourquoi les forces de la gauche communiste sont-elles si faibles??? Cela est essentiellement dû à la contre-révolution qui perdure, avec seulement une petite interruption lors des années’70 qui avait d’ailleurs vu les forces de la gauche communiste se multiplier, depuis les années’30. Les forces de la gauche communiste ont été très puissantes au début des années ’20, par exemple elles dirigeaient le parti communiste d’Italie et avaient leur propre parti en Allemagne, le KAPD, qui revendiquait quelque 50 000 membres. Par contre, avec la défaite des révolutions partout en Europe, incluant en Russie, et le début de la contre-révolution, les forces de la gauche communiste ont commencé à fondre comme neige au soleil. Aujourd’hui, de ses héritiers directs il ne reste que le CCI, la TCI et les divers partis bordiguistes.

Pour ce qui est de l’unification et des concessions de l’ensemble de la gauche, il y a une chose importante à savoir. Il faut déterminer quelles sont ces organisations dans la gauche qui sont réellement des organisations du prolétariat, qui sont sur des positions de classe. Ces positions de classe pour nous, c’est le parti international et internationaliste, la dictature du prolétariat, les conseils ouvriers, rejet des syndicats et du parlementarisme, etc. Toutes les organisations qui ne défendent pas ce genre de positions sont, pour nous, des organisations de la bourgeoisie. Ainsi, la social-démocratie est passée dans le camp de la bourgeoisie quand elle a participé à la Grande guerre. De même, les trotskistes sont passés dans le camp de la bourgeoisie quand ils ont lutté pour la défense de l’État bourgeois contre les fascistes pendant la 2e guerre mondiale. Sans parler des maoïstes et des staliniens qui eux sont ouvertement pour le capitalisme… d’État ! Bref, comme tu peux le voir une grosse partie de la gauche fait maintenant partie intégrante du camp bourgeois. Toute action commune avec ces groupes est, à notre avis, inutile et même nocive. Ce sont là les positions classiques de la gauche communiste : rejet des fronts populaires, uniques, anti-fascistes. Évidemment, ces actions communes ou discussions sont à mettre de l’avant au sein des groupes de la gauche communiste (CCI, TCI, PCI) même si elles sont difficiles ces temps-ci.

En Russie, 1917 la famine avait poussé bien des gens dans la rue, et c’est par une sorte d’opportunisme que le mouvement communiste s’est emparé du pouvoir. Tous les habitants qui ont participés à la révolution d’octobre étaient-il tous des communistes bolchéviques? Pas convaincu. À mon humble avis, Lénine a profité du vent de changement et de la chute du régime tsariste pour mener le peuple russe selon sa propre conception du communisme. Un pays aussi rural ne pouvait pas être entièrement autosuffisant et autonome. La Russie a donc été menée de force vers une industrialisation massive où le peuple agissait comme armée de travailleurs au service de l’état. La Russie n’a donc jamais été vraiment communiste mais elle pratiquait une sorte de capitaliste d’état. Voilà pour l’illusion communiste tel qu’on aime nous le montrer. Voyez le méchant communiste : c’est Mao, Staline, la perte de la liberté d’expression, les goulags, le travail forcé, etc. C’est la conception du communisme que l’idéologie dominante vise à propager pour que les gens aient peur du communisme et accepte tout les abus de la société totalitaire marchande dans laquelle on vit aujourd’hui.

En Russie en 1917, ce n’est pas le mouvement communiste, pris dans le sens de parti communiste, qui a pris le pouvoir, mais c’est bien la classe ouvrière qui a pris le pouvoir à l’aide d’une nouvelle forme d’organisation, les conseils ouvriers. Les prolétaires russes n’étaient de toute évidence pas tous membres du parti bolchévik. Mais ils suivaient massivement la direction politique qu’assuraient les bolchévik. Par direction politique, je veux dire les mots d’ordre, la propagande, les actions proposées, etc. Bref, les bolchéviks agissaient comme une minorité consciente du prolétariat qui essayait de conscientiser ses propres frères et soeurs de classe.

Le caractère économiquement arriéré de la Russie à l’époque de la révolution est bien sur un facteur qui à contribué au début de la contre-révolution en Russie qui s’est achevée par un régime capitaliste d’État complètement barbare, représenté par, comme tu le dis, Staline en URSS et Mao en Chine. Mais ce n’est pas le seul facteur. Il faut toujours analyser les situations révolutionnaires sur un plan international. Ainsi, comme toi, nous reconnaissons que la révolution doit être internationale pour vaincre. Au niveau international, les révolutions en Allemagne, Autriche, l’est de la France, Hongrie, Italie ont tous été écrasées par une contre-révolution vers le début des années’20. La Russie révolutionnaire se trouvait donc complètement isolée, ce qui fatalement allait produire une contre-révolution et elle se produira sous le stalinisme. La Russie n’a donc, comme tu l’affirmes, jamais été communiste. Cependant, un mouvement communiste et révolutionnaire a tout de même tenté, durant quelques années, de créer les bases d’une société communiste.

La gestion de la production de l’entreprise ou l’usine par les travailleurs semble logique de prime abord mais quelques doutes planent dans mon esprit à ce sujet. Que fait-on des entreprises néfastes pour l’environnement. Qui décidera de fermer l’endroit où il travaille car les biens produits n’est d’aucune utilité dans le nouveau monde crée? On remet en question la propriété privée des entreprises et non leur utilité sur la planète. Ce n’est pas le mode de gestion des entreprises qu’il faut remettre en jeu mais tout le mode de vie occidental de consommation de masse. Imaginez le nombre incroyable de gens de nos jours qui se retrouverait sans travail car le boulot qu’il faisait n’apportais rien à l’humanité (assurance, banque, avocat, producteur de gadget, etc.) Qui décidera de ce qui doit continuer d’être produit et de la quantité nécessaire pour chaque personne?

Dans la société communiste, les êtres humains, ayant repris le contrôle de leur vie, de ce qu’ils produisent et en étant conscient que leur activité a un impact sur la biodiversité, réduiront, voire arrêteront les industries trop polluantes. On ne peut pas prédire l’avenir avec certitude, mais nous croyons que c’est une avenue forte possible et réalisable. La décision de fermer des usines polluantes reviendrait sans doute aux conseils ouvriers de ce territoire (conseils d’usines avoisinantes, conseils de quartiers, etc.)

Il est clair que le capital, pour s’autovaloriser ou plus simplement pour qu’il puisse « faire plus de cash avec son cash! », créer une multitude de besoins futiles à l’aide par exemple de la publicité. Mais, avec l’élimination du capital, ces besoins futiles vont, à termes et non instantanément, disparaître. Pour éliminer le capital, il faut éradiquer ce qui est à sa base, c’est-à-dire le travail salarié. Et pour éradiquer le travail salarié il faut en quelque sorte « remettre en jeu le mode de gestion des entreprises. »

Les gens ne se retrouveront jamais sans travail dans la société communiste puisque que le travail salarié y sera aboli. Les gens n’auront plus à vendre leur force de travail pour survivre. Ainsi, chacun donnera en frais de tâches ce qu’il est en mesure donné à la société et recevra de celle-ci tous ce qu’il a besoin. D’ailleurs l’élimination des jobs qui ne servent plus à rien pourra faire en sorte, parmi une multitude d’autres facteurs comme l’élévation des forces productives, que les gens auront plus de loisirs. La production et la distribution (pour la consommation) seront centralement décidées et planifiées par les travailleurs eux-mêmes dans leurs conseils ouvriers.

J’aime bien l’idée des narodniks (mouvement en Russie fin 1800) et aussi le municipalisme libertaire. Le territoire est divisé en petites entités indépendantes qui se réunissent sous une forme de fédération composée de 4-5 villages maximum. Les décisions peuvent être prises en commun dans des conseils de paysans et d’ouvriers qui y travaillent. Certes, ces habitants ne vivent pas dans le luxe mais la libération du travail salarié et le sentiment d’appartenance à la communauté compense pour les biens matériels qui constituent nos chaînes d’aujourd’hui.

Je ne connais que superficiellement ces courants de pensée. On pourrait donc avoir une discussion approfondie, ce serait souhaitable, sur ce sujet. Mais à première vue, ce genre de courant de pensée ne lutte pas pour le socialisme, mais pour un retour en arrière vers des modes de production à caractère nettement féodal et moyenâgeux. L’essor du capitalisme, par rapport au féodalisme, était un progrès. En effet, le mode de production capitaliste et l’amélioration de la technique (ou technologie) qui est son corollaire donne la possibilité aux êtres humains de se libérer du travail salarié et d’assouvir l’ensemble de leurs besoins. Il faut bien sur, comme préalable, une révolution communiste!

L’être humain moderne, lobotomisée, agit en vrai robot. Travailler et consommer sont les deux choses qui occupent la plupart de sont temps. Pendant ce temps, la classe dominante retire profit de la plus-value que l’ouvrier ajoute au produit brut. Les excès du capitalisme actuel sont de plus en plus connus des gens mais ceux-ci étant prisonniers de la spirale de la consommation et de l’endettement, il ne voit pas d’autres options que de vendre son âme pour vivre comme ses semblables. Depuis, l’expansion du libre-échange et la mondialisation des marchés les effets pervers du capitalisme sont encore plus évidents. La machine est bien huilée, la propagande subtile (pas toujours) des médias d’aujourd’hui marche à merveille. Selon elle, il n’y a pas d’autres options possibles, ont tente de nous faire croire qu’en rendant le capitalisme plus humain ou plus contrôlé la situation s’arrangera. Le bonheur est dans le matériel, vivez, travaillez, consommez le plus possible, fondez une famille et soyez un esclave modèle. Tel est le triste destin de l’homme moderne.

Rien à ajouter!

Le mythe du gouvernement protecteur de la population est chose du passée. Celui-ci est main dans la main avec les entreprises et multinationales de ce monde, ainsi on finance des recherches et de nombreux projets avec l’argent public pour que les compagnies privées fassent de l’argent avec ces mêmes technologies (internet, ordinateur, agriculture, médicaments, etc.) Même si je ne suis pas un pro-gouvernement la tendance actuelle à la privatisation des services essentiels (santé, éducation, transport,etc) et à l’octroi de contrat à des compagnies privées par le gouvernement est très inquiétante. On semble dénigrer tout ce qui est gouvernemental, le privé est beaucoup plus rentable, moins de perte de temps…On oublie que sa seule motivation c’est le profit comme en fait foi le scandale concernant la sous-traitance pour l’alimentation des hôpitaux. Mais comment nous sortir de cet enfer ???

La tendance que tu soulignes, c’est-à-dire la tendance selon laquelle les États financent des entreprises privées, est en fait une tendance au capitalisme d’État qui s’est développé durant la période des guerres mondiales et qui n’est, malgré le néolibéralisme, pas tout à fait terminer. L’État étant l’État des bourgeois, il est tout à fait normal qu’il vienne aider ses « chums » quand ceux-ci ne réalise pas ou pas assez de profit, lors des crises économiques par exemple.

Même si l’étatisation de certains services comme les soins ou l’éducation en tant que modernisation du capitalisme était un progrès pour la classe ouvrière, cela ne veut pas dire qu’elle doit lutter strictement contre les privatisations. Le prolétariat n’a pas à choisir entre un capitalisme libéral ou un capitalisme d’État, il doit lutter pour le socialisme. Une lutte pour maintenir le système de santé public est malgré tout une lutte pour le maintien de « l’État providence », dans nos mots pour le maintien du capitalisme d’État. Là où cela devient intéressant, c’est que l’État en coupant dans les services publics, attaque directement le niveau de vie du prolétariat. Le prolétariat, comme en ce moment en France, en Grèce ou en Espagne, luttera contre ces attaques, se défendra.Ainsi, notre job, les communistes, est d’amener notre classe à ne pas lutter pour le maintien de « l’État providence » (au capitalisme d’État), mais pour la révolution communiste. Cela n’empêche pas aux prolétaires de lutter contre les coupures dans les services publics, ces luttes doivent seulement être portées à un niveau supérieur, c’est-à-dire contre l’État capitaliste directement.

La mobilisation des masses doit être organisée, notre point de vue sur l’émancipation de l’humain par l’abolition de l’argent et du travail salarié doit être diffusé au plus grand nombre de gens possible. Bien des gens sont si accaparés par leur travail et leur apparence qu’ils oublient même de regarder grandir leurs enfants, de jouir de la vie. Alors avant que la majorité s’intéresse à l’élimination des rapports de force et d’exploitation présente de nos jours, les poules vont avoir des dents. Désolé pour mon pessimisme, mais il y a loin d’avoir la coupe aux lèvres. Quand on regarde l’accroissement des lois qui protège la propriété privée et la répression exercée par les autorités sur tous les mouvements contestataires du monde (à Toronto récemment), il est difficile d’en faire autrement.

L’acquisition de la conscience de classe pour notre classe, pour qu’elle se mette en action contre le capitalisme, peut être un processus de longue haleine. Cela dépend de pleins de facteurs économiques, sociaux ou historiques. Mais si l’on ne fait rien, ça ne raccourcira pas le processus, au contraire! C’est pour cela que nous militons!

Les États-Unis sont reconnus pour lutter férocement contre toute tentative de pseudo socialisme ou de communisme comme on a pu le voir en Amérique du Sud notamment. Quels moyens doit prendre le prolétariat pour prendre le pouvoir et abolir une fois pour toute cette société qui nous condamne à l’esclavage salarié ??Une grève générale, une révolution armée, des manifestations internationales, un boycott général des biens de consommation?? Il faut être organisée et avoir un plan clair sur le fonctionnement de la société de demain. Le mouvement communiste internationalistes m’a certes convaincu de la nécessité d’une révolution prolétaire mondiale mais il ne m’a pas vraiment éclairé quand au fonctionnement en profondeur de cette éventuelle société.

Comme tu le dis, il est nécessaire de s’organiser, mais pas n’importe comment! Ainsi pour nous, nous devons nous organiser à l’échelle internationale (le prolétariat n’a pas de patrie) et de façon centralisée (le prolétariat a un seul intérêt partout dans le monde : l’abolition du salariat). Cette organisation, ce parti aura la tâche de diriger politiquement les révoltes prolétariennes, les diriger vers leur finalité, la révolution communiste. Ce parti sera constitué des éléments les plus conscients et les plus révolutionnaires du prolétariat. Il aura la tâche d’amener les larges masses du prolétariat vers ses positions de classes. La classe ouvrière prendra le pouvoir à l’aide des conseils ouvriers. Elle réprimera ainsi, probablement dans une guerre civile, la bourgeoisie pour mater la contre-révolution et posera les fondements d’une nouvelle société.

On ne peut pas prédire exactement le fonctionnement de la future société. Nous ne sommes en rien des prophètes. Seulement, on peut apercevoir certains éléments dans les luttes actuelles et du passé qui pourront être les fondements de la nouvelle société, par exemple, les conseils ouvriers, la possibilité technique de travailler 2 ou 3 heures pas jour, la possibilité technique de combler l’ensemble de nos besoins, etc.

Ce fût un plaisir d’avoir fait votre connaissance et tenez moi au courant de vos activités.

Jean