mardi 5 juillet 2011

La « Grève de masse », un fait ou un processus ?

Nous publions ce texte du dernier bulletin #5 de la Fraction de la Gauche Communiste Internationale qui complète et corrige un tract (La "grève de masse" aujourd'hui et demain - Pour aller plus loin que les manifestations défouloirs contrôlées par les centrales syndicales). Le tract distribué était un résumé avec nos ajouts, d’un texte édité par nos camarades de la FGCI.

Nous avons distribué notre tract en mars lors d’une manifestation de l’Alliance sociale et de la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics.

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Lors de rencontres ou par mail, des camarades et lecteurs nous ont exprimé des réserves, un scepticisme sur notre analyse de la situation historique et particulièrement de l'évolution de la lutte des classes. Nous reprenons et restons fidèles à la méthode d'analyse du CCI d'origine, en particulier avec son analyse d'un « cours historique menant à des confrontations massives de classe », telle qu'elle a été largement développée et présentée dans la Revue internationale de cette organisation tout au long de son histoire, en particulier dans les années 1980. Parmi toutes les questions se rapportant à cette méthode d'analyse, une d'entre elles a plus particulièrement vu s'exprimer des questionnements, des incompréhensions ou des désaccords. Il s'agit de notre appréciation selon laquelle s'est ouverte aujourd'hui une période de « grève de masse internationale ». Certains rejettent le mot même de grève du fait que les grèves ne sont pas l'élément principal des réactions ouvrières aujourd'hui. D'autres estiment que nous surestimons le niveau de la lutte des classes car évoquer la « grève de masse » pour caractériser la période actuelle serait croire que nous nous trouvons dans une période révolutionnaire ou pré-révolutionnaire. Or, pour nous, c'est ouvertement, sous nos yeux, et cela malgré les tentatives soit de silence et de censure - rien dans les TV et journaux sur les grandes manifestations ouvrières en Grèce au moment même où avaient lieu le mouvement des « indignés » en Espagne -, soit de déformation - les mouvements actuels seraient pour de « véritables démocraties » -, que se déroule et se développe une dynamique de lutte en masse au niveau international. Les mouvements de classe d'Afrique du Nord, Tunisie, Egypte, aussi faibles étaient-ils, ont répondu aux réactions et luttes prolétariennes de la fin 2010, particulièrement à celle d'Europe (Grèce, France, Grande-Bretagne, Portugal, Espagne, etc.). Et à leur tour, ces mouvements des pays arabes, sur lesquels le prolétariat international avait les yeux braqués, sont venus être des facteurs d'encouragement au surgissement et au développement de mouvements de lutte en Europe, en Espagne bien sûr, en Grèce, etc... Il s'agit bien d'une dynamique internationale de luttes ouvrières face à la crise et aux attaques sur les conditions de vie qui est en train de se développer et de s'approfondir - quels que soient les obstacles qui met la bourgeoisie. Le processus de « grève de masse » est en cours... Nous avons décidé de mettre par écrit l'une de nos interventions sur le sujet estimant que cette question devait être portée et débattue le plus largement possible.

Ce que Rosa Luxemburg appelle "grève de (ou 'en' selon la version française) masse" et qu'elle décrit longuement et clairement dans son ouvrage, ne représente pas seulement, comme certains le pensent faussement, 1905 ou un événement de ce type, c'est-à-dire un mouvement de classe qui poserait ouvertement la question de la révolution ; c'est la lutte de classe et son processus de développement dans la période qui s'est ouverte au début du 20ème siècle. "Aujourd'hui la révolution russe a soumis cette argumentation à une révision fondamentale; elle a, pour la première fois, dans l'histoire des luttes de classe, permis une réalisation grandiose de l'idée de la grève de masse et même - nous l'expliquerons plus en détail - de la grève générale, inaugurant ainsi une époque nouvelle dans l'évolution du mouvement ouvrier." (Rosa Luxemburg, Grève de masse, parti et syndicat, 1906), notamment le processus qui va jusqu'à la période révolutionnaire, donc qui inclut ce qui la précède et la prépare :

« Ainsi quiconque veut parler de la grève de masse en Russie doit avant tout avoir son histoire devant les yeux. On fait commencer à juste titre la période actuelle, pour ainsi dire officielle, de la révolution russe avec le soulèvement du prolétariat de Saint-Pétersbourg le 22 janvier 1905 (…). Mais ce soulèvement de Saint-Pétersbourg, le 22 janvier n'était que le point culminant d'une grève de masse qui avait mis en mouvement tout le prolétariat de la capitale du tsar, en janvier 1905. A son tour, cette grève de janvier à Saint- Pétersbourg était la conséquence immédiate de la gigantesque grève générale qui avait éclaté peu auparavant, en décembre 1904, dans le Caucase, à Bakou et tint longtemps toute la Russie en haleine. Or, les événements de décembre à Bakou n'étaient eux-mêmes qu'un dernier et puissant écho des grandes grèves qui, en 1903 et 1904, tels des tremblements de terre périodiques, ébranlèrent tout le sud de la Russie, et dont le prologue fut la grève de Batoum dans le Caucase en mars 1902. Au fond cette première série de grèves, dans la chaîne continue de éruptions révolutionnaires actuelles, n'est elle-même distante que de cinq ou six ans de la grève générale des ouvriers du textile de Saint-Pétersbourg en 1896 et 1897. »

Réduire la "grève de masse" aux seuls mouvements prérévolutionnaires ou même révolutionnaires qu'a développés et développera notre classe est une incompréhension profonde de ce que met en avant Rosa Luxemburg et de l'essentiel du combat du prolétariat dans une période qui n'est pas contrerévolutionnaire (ce qui est le cas actuellement, et cela depuis la reprise ouvrière de 1968). Quand, dans notre texte du bulletin précédent, La "Grève de masse" aujourd'hui et demain, nous avons osé parler de "grève de masse" pour les combats qui se déroulent "aujourd'hui", nous n'avons fait, et cela fort modestement, que reprendre la vision que Rosa Luxemburg nous a transmis. Nous pouvons même dire que les conditions actuelles (l'ampleur et la profondeur de la crise qui s'attaque au monde capitaliste tout entier jusque dans son coeur ; ses implications terribles sur la classe ouvrière entrainant la paupérisation des masses ; les luttes de riposte massives qui gagnent toutes les zones de la planète...) donnent une ampleur à cette vision que même Rosa n'avait pu envisager. En effet, ce qu'elle décrivait au niveau de la seule Russie, nous le voyons commencer à se développer au niveau international : ces derniers mois seulement nous ont permis de voir des luttes importantes (par leur ampleur, par leur durée et par leur radicalisme anti-capitaliste) se développer simultanément ou se relayer, traversant l'Europe du nord au sud, passant au versant sud de la Méditerranée pour revenir vers son versant nord, s'attaquant tout aussi fortement aux autres continents et cela sans qu'aucune zone ne soit réellement épargnée. Et, parce que les conditions objectives, pour le moins, ne peuvent aller qu'en se développant, l'essentiel de ce processus de "grève de masse", qui a déjà commencé, se situe, à notre avis, devant nous.

Contrairement à ceux qui pourraient penser que Grève de masse, parti et syndicat est un vieux texte, « inadapté » à ce qui se passe dans notre période, voire même un texte « dépassé », nous invitons tous les communistes et militants à le relire attentivement et à se réapproprier ce texte (et tant d'autres) du mouvement ouvrier. Les communistes ont constamment, et aujourd'hui plus que jamais, besoin des enseignements que notre classe a tirés de ses expériences, donc des écrits des grandes figures du marxisme, comme Rosa Luxemburg, pour comprendre et intervenir dans la situation actuelle.

Tout ce que nous mettons en avant ici concernant le développement de la lutte de classe aujourd'hui ne signifie surtout pas que, pour nous, c'est "une autoroute" qui se profile devant notre classe. Si notre fraction refuse de minimiser ou d'ignorer les très fortes colère et combativité ouvrières qui s'expriment actuellement à travers la planète (et surtout dans les pays du coeur du capitalisme), elle est, en même temps, pleinement capable de prendre en compte la faiblesse importante que révèle actuellement le prolétariat au niveau de sa conscience (difficulté à se concevoir en tant que classe et perte de vue momentanée de sa perspective historique qui se manifestent notamment, par la très faible influence, en son sein, de la Gauche communiste...), laquelle est avant tout le fruit de la prétendue "fin du communisme" qui a fait suite à l'effondrement du stalinisme. Cependant, nous sommes certains qu'il ne peut y avoir de dépassement de cette faiblesse sans le développement du combat quotidien et de plus en plus large que mène la classe contre les effets de la crise capitaliste. Il est là le chemin ; c'est ce à quoi nous assistons actuellement et que nous devons, d'abord et sans réticences, soutenir et encourager. Comme dit Rosa : "Un océan de privations et de souffrances terribles est en effet le prix auquel toute révolution est achetée par la masse prolétarienne.... Cet éveil de la conscience de classe se manifeste immédiatement de la manière suivante : une masse de millions de prolétaires découvre tout à coup, avec un sentiment d'acuité insupportable, le caractère intolérable de son existence sociale et économique, dont elle subissait l'esclavage depuis des décennies sous le joug du capitalisme. Aussitôt se déclenche un soulèvement général et spontané en vue de secouer ce joug, de briser ces chaînes. Sous mille formes les souffrances du prolétariat moderne ravivent le souvenir de ces vieilles plaies toujours saignantes."

Mais la bataille est encore, pour l'essentiel, à mener ; le processus de "grève de masse" n'en est, selon nous, qu'à ses débuts, non pas seulement du fait des faiblesses actuelles propres à la classe qui a l'immense responsabilité historique de se lancer "à l'assaut du ciel", mais aussi et surtout du fait de la pression énorme qu'exerce sans cesse sur elle la classe dominante, physiquement et surtout idéologiquement. Cette pression, qui s'est surtout développée dans la période de décadence, prend, dans la période que nous vivons et qui révèle de plus en plus clairement la faillite totale du capitalisme et l'incapacité de la bourgeoisie à lui apporter une solution, une importance jamais atteinte dans l'histoire de l'humanité. C'est une classe dominante au bord du gouffre qui est dans l'obligation de peaufiner et d'utiliser toutes les outils à sa disposition pour chercher à désarmer préventivement son bourreau, d'où le développement incroyable de la répression, celui des immenses campagnes idéologiques (les "démocratiques" avec toutes leurs déclinaisons, l'anticommunisme etc.), dont le prolétariat est la principale cible et d'où la multiplication des obstacles qu'elle place au sein même de ses luttes.

Concernant ce tout dernier aspect (les obstacles au sein des luttes), existe une conception de la lutte de classe que les communistes ne peuvent pas partager et qu'ils doivent combattre. Celle-ci se révèle dans une certaine tendance à mésestimer, pour le moins, les luttes ouvrières dans lesquelles s'exprime l'influence de la bourgeoisie (aujourd'hui, la présence ou le contrôle des syndicats, les illusions démocratiques et autres...) ; comme si, pour exprimer les intérêts et les préoccupations de la classe ouvrière, les luttes se devaient d'être "pures". Ainsi, celles qui, semble-t-il, sont, à un niveau ou à un autre, influencées par l'idéologie de la bourgeoisie ou qui seraient contrôlées par ses agents politiques ou syndicaux, seraient à ignorer ou peut-être même à rejeter. Développer une telle conception et vouloir agir en fonction d'elle reviendrait à attendre la lutte "pure" et donc à rejeter la quasi-totalité du combat du prolétariat. Dans la conception marxiste, il n'y a pas de lutte "pure" qui, seule, mériterait d'être prise en considération ; selon nous, une telle conception serait, au mieux empruntée à l'idéalisme, voire à l'anarchisme. Le combat contre la classe ennemie existe jusqu'au sein même de la lutte. L'affirmation de la classe ne passe pas seulement par son opposition ouverte à l'exploitation que lui impose le capitalisme, mais aussi et obligatoirement par son combat pour se défaire de la présence et de l'influence, au sein de ses luttes, de la classe ennemie. C'est ce que l'expérience historique nous a amplement démontré, surtout dans la période de décadence dans laquelle la bourgeoisie a développé le capitalisme d'État avec sa mainmise sur tous les plans de la société, en particulier vis-àvis de la classe qui la hante. Il n'est pas nécessaire d'étaler ici tous les exemples qui le prouvent ; mais, n'est-il pas, au moins, nécessaire de rappeler que, jusque dans "la forme enfin trouvée de la prise du pouvoir" - les conseils ouvriers -, ce combat a eu lieu en 1905, en 1917, en Russie et en Allemagne ; qu'en leur sein, la bataille a pu voir dans un cas la victoire de notre classe, dans l'autre celle de l'ennemi. Débarrassons-nous donc de cette conception de la lutte "pure", car elle ne permet pas d'appréhender la réalité et surtout elle n'appartient pas au prolétariat.

La FGCI (08/06/11)


lundi 30 mai 2011

Les anarchistes contre la classe ouvrière


Nous venons de publier une brochure Les anarchistes contre la classe ouvrière. Quel est donc le but de cette brochure? De par la radicalité de son discours et de ses moyens d’actions, le mouvement anarchiste rejoint certaines franges du prolétariat, en particulier les jeunes travailleurs-euses et les étudiants prolétarisés. Cette brochure veut donc montrer en quoi l’anarchisme est une voie de garage pour la lutte révolutionnaire et en quoi il est, en période révolutionnaire, un des derniers recours que la bourgeoisie a entre ses mains pour sauvegarder le capitalisme. En d’autres mots, nous souhaitons, à travers la dénonciation de l’anarchisme, remettre à l’ordre du jour le programme communiste, l’exposer devant notre classe en espérant que plus de travailleurs-euses, dans leurs luttes contre le capital, se l’approprient.
Index de la brochure
Les anarchistes contre la révolution prolétarienne
La radicalisation des mouvements sociaux
Autogestion, lifestylisme et activisme
Frontisme avec la bourgeoisie
Le marxisme est-il autoritaire?
Bon communisme, méchant communisme
L’État comme puissance dominatrice autonome? Où la conception dominé/dominant pour évacuer la lutte de classes
Organisation, centralisme et fédéralisme
Révolution prolétarienne
Internationalisme
Rôle du parti
Rôle des conseils ouvriers
Dictature du prolétariat
Annexe I : Espagne 36 : Le mythe des collectivités anarchistes
Annexe II : Réponse à l’action des groupes gauchistes le 1er mai 2008
Annexe III :L’anarchisme cherche à infiltrer le camp prolétarien. Le Courant Communiste International actuel lui ouvre la porte.
Positions de base des Communistes Internationalistes-Klasbatalo
Il est possible de la commander en envoyant un courriel avec vos coordonnées en écrivant à : cim_icm@yahoo.com

mardi 17 mai 2011

Moyen-Orient, gaz de schiste, élections…lettre d’un sympathisant et notre réponse

Salut

Tout va très bien, désolé pour mon silence mais j'ai de nombreux projets en cours : verger biologique, restauration lacs, et en plus producteur acéricole et forestier. J'ai lit le tract sur l'égypte et d'autres textes que vous m'avez envoyer qui sont très représentatifs de la situation. Cette vague de colère est exploité par nos médias qui dénonce les méchants dictateurs tandis que la démocratie à l'occidentale est tellement irréprochable et la vois de l'avenir. Le dossier inquiétant du moment à mon avis c'est l'exploitation des gazs de schiste au québec, à ce sujet le documentaire ``gasland`` nous dresse un portrait de ce qui nous attend si nous nous mobilisons pas. Et tant qu'on vivra dans une société capitaliste nous devrons nous défendre contres ses bandits. Si on élimine l'argent et le profit pour établir une société équitable et éthique où tout abus envers dame nature sera proscrit, là nous pourrons dire que nous avons pris le droit chemin.

Continuez de m'envoyer vos tracts, source d'espoir.

Un sympathisant

Salut

Nous sommes tous biens contents d’avoir de tes nouvelles. Nous sommes aussi très enthousiastes à l’idée que tu lis les textes et tracts que l’on t’envoie de temps à autre.

Bravo de ne pas avoir tombé dans le piège démocratique lors des derniers événements du monde arabe. En effet comme tu l’affirmes, que ce soit la démocratie libérale ou une dictature militaire qui règne au Maghreb, le seul grand maître de la société actuellement et internationalement est le capitalisme. C’est donc un leurre de combattre en ce moment au Moyen-Orient pour la démocratie alors qu’un nouveau régime démocratique là-bas ne changerait rien sur le fond : le capital exploiterait le prolétariat de toute façon! La plupart de groupes de gauche ont soutenu les « révolutions » sous prétexte que la démocratie est un moindre mal comparé à la dictature. En fait, ils se démasquent en tant que partisans d’un capitalisme à visage humain. Or, un tel capitalisme n’existe pas! En effet, parce qu’il est un système composé de cycles économiques (et donc politiques), un cadre systémique compétitif, il n'est pas gouvernable par les sentiments ou le bon-vouloir moral de ses dirigeants. Et c’est donc pour cela que nous organisons pour de renverser le capitalisme!

Au sujet de l’exploitation des gaz de schiste, en effet c’est très préoccupant comme tu l’affirme. Seulement, on ne peut pas comprendre pourquoi l’industrie pétrolifère au Québec tient tant à ses puits de gaz de schiste sans comprendre les logiques mêmes du capitalisme. Le capital doit toujours faire de plus en plus de profit pour se maintenir en tant que capital, sinon il dépérit face à la concurrence. En d’autres mots, les big boss de l’industrie du pétrole et du gaz doivent toujours trouver d’autres moyens pour faire plus de profits, sinon d’autres big boss vont les manger tout rond. Un de ceux-là est de développer des nouveaux marchés en exploitant des ressources naturelles qui étaient jusqu'à maintenant inexploitées, comme les gaz de schiste. Ainsi, pour nous, lutter contre le développement des puits de gaz de schiste, une lutte importante au niveau de la protection de l’écosystème, ne peut se concevoir que dans le cadre d’une lutte générale contre le capitalisme, donc une lutte pour la révolution prolétarienne.

Qu’en penses-tu?

Nous continuerons de t’envoyer tous nos tracts, textes, prises de position et brochures. Je t’invite fortement à visiter, en complément à notre matériel et seulement dans la mesure où tu as du temps libre, les sites internet de d’autres organisations de la Gauche Communiste :

http://www.leftcommunism.org/index.php?lang=fr

http://fr.internationalism.org/

http://fractioncommuniste.org/

http://proletariatuniversel.blogspot.com/

http://www.pcint.org/

http://www.leftcom.org/fr

Et bien sûr notre blogue :

http://klasbatalo.blogspot.com/

Porte-toi bien!

… pour les Communistes internationalistes – Klasbatalo

samedi 23 avril 2011

ÉLECTIONS CANADIENNES : A BAS LE CIRQUE ÉLECTORAL, VIVE LA LUTTE PROLÉTARIENNE!

Le 2 mai prochain le cirque parlementaire jouera son énième représentation au Canada pour l’élection d’un nouveau gouvernement fédéral. Les divers partis de la bourgeoisie se sont rués pour participer à cette mascarade une fois de plus et pour convaincre les travailleurs qu’en votant pour eux ils amélioreront leur sort!

Pendant ce temps les conditions de vie de la classe prolétarienne continuent de se détériorer avec notamment des suppressions d’emploi, comme avec la fermeture annoncée pour 2012 de l’usine d’électroménagers Electrolux située dans la ville de l’Assomption au Québec. Les attaques contre les acquis sociaux(Note 1 des CIK), gagnés grâce à de dures luttes ouvrières, se poursuivent partout au Canada, comme avec le dernier budget du ministre des Finances Raymond Bachand au Québec. Les frais de scolarité des universités québécoises, qui sont historiquement les plus bas en Amérique du Nord, vont augmenter de 325$ par année à compter de 2012 dans le but de rattraper la moyenne canadienne, passant de 2168$ (leur niveau actuel) à 3793$ pour chaque année de scolarité! Les cotisations au régime de retraite québécois ont aussi été augmentés, accroissant ainsi les ponctions sur le revenu prolétarien, et une hausse des pénalités de 0.5% à 0.6% pour ceux et celles qui prendront leur retraite avant 65 ans a été institué. A Toronto, principale ville canadienne, le maire nouvellement élu en 2010 Rob Ford, veut privatiser la majeure partie de la collecte de déchets, la Société d’habitation de Toronto et «tout ce qui n’est pas coulé dans le ciment», autrement dit une bonne partie des services publics de cette ville. Le but est de faire baisser le plus possible les conditions de travail des prolétaires qui travaillent dans les services publics. Le dernier budget du gouvernement Harper en mars dernier a institué une augmentation les cotisations au régime d’assurance-emploi, diminué les impôts des grandes entreprises, gelé les dépenses d’exploitation des sociétés d’États comme Radio-Canada et Postes Canada pour bloquer toute hausse salariale pour les employés, etc.

Tout ceci n’est qu’un avant-goût de ce qui attend la classe ouvrière canadienne, car les effets de la crise capitaliste qui va s’intensifiant obligent la bourgeoisie à accroître son exploitation en s’attaquant toujours plus à ses conditions de vie et de travail, y compris en rognant les acquis concédés autrefois pour maintenir la paix sociale. Le prolétariat ne pourra y répondre que la lutte, pas par les élections.

En effet, contrairement au mythe répandu par la classe dominante, ses médias monopolisés, les institutions bourgeoises (école, églises, etc…) et par les partis et syndicats réformistes (Voir la note 2 des CIK) , les élections ne représentent nullement une quelconque expression d’une «volonté populaire». L’orientation des politiques gouvernementales est déterminée par les intérêts des grands groupes capitalistes dont l’État bourgeois est un serviteur. Les élections ne servent à rien sinon à mystifier le prolétariat en lui faisant croire que son bulletin de vote peut contribuer à faire «changer les choses». Elles font perdurer les illusions démocratiques, selon lesquelles tous les «citoyens» sont égaux et l’Etat est une institution neutre obéissant gentiment aux bouts de papier déposés dans les urnes, et qu’il n’est donc pas besoin de la lutte de classe. Ces illusions, qui sont un obstacle majeur à la reprise de la lutte des classes, contribuent à maintenir le mythe puissant à l’effet que les institutions démocratiques peuvent servir à faire avancer les intérêts du prolétariat, alors que les institutions politiques de la démocratie bourgeoise sont au service exclusif de la classe dominante et sont utilisées pour réprimer la lutte prolétarienne.

Un des aspects de ces élections (la quatrième en 7 ans!) est la campagne, initiée par la gauche réformiste, qui appelle à ne pas voter pour le Parti Conservateur du premier ministre Stephen Harper, au pouvoir depuis janvier 2006, et qui serait particulièrement dangereux et réactionnaire. Nul doute que ce parti soit profondément rétrograde et anti-ouvrier, mais en quoi est-il si différent des autres partis bourgeois?

Le Parti Libéral du Canada a représenté le principal parti de la bourgeoisie canadienne depuis la Confédération de 1867 et a constamment attaqué les droits et intérêts du prolétariat, notamment avec la Loi sur les mesures de guerre en 1970 sous le prétexte de mater une insurrection appréhendée au Québec. Le chef du PLC, Michael Ignatieff, vient de promettre qu’il poursuivra l’intervention impérialiste canadienne en Afghanistan s’il est réélu! Quand il était au pouvoir dans les années 90, le Parti Libéral a sabré sauvagement dans l’assurance-chômage et a détourné des fonds destinés à ce programme pour éponger le déficit fédéral!

Le Nouveau Parti Démocratique, membre sur le papier de la IIème Internationale réformiste, axe son discours sur l’aide aux familles ou l’amélioration des soins de santé pour les aînés. Le Bloc Québécois régionaliste, nationaliste bourgeois, ne parle que des «intérêts du Québec», comme si les travailleurs et les patrons québécois avaient des intérêts similaires!

Quant au Parti Vert du Canada, il propose tout simplement d’humaniser la gestion de l’environnement à l’intérieur du capitalisme, qui est pourtant le responsable de la détérioration continue de l’environnement. Tout ceci dévoile on peut plus clairement les fausses alternatives qui nous sont présentées par le cirque électoral et démontre l’imposture de la campagne Tout sauf Harper qui s’insère parfaitement dans la défense du système capitaliste d’exploitation en mettant de l’avant un «moindre mal» au Parti Conservateur. Les promoteurs de cette campagne sont des adversaires de classe des prolétaires au même titre que les Conservateurs.

Tous les partis représentés au Parlement canadien ont voté à l’unanimité en faveur de l’intervention impérialiste en Libye sous le prétexte de «protéger la vie des civils libyens»! Le Parti Vert se prononce en faveur d’une «intervention diplomatique rapide et soutenue en Libye afin d’empêcher la situation de dégénérer en guerre civile». « Nous ne devons pas perdre de vue notre priorité – prévenir la mort d’innombrables civils libyens innocents », a rappelé Ellen Michelson, porte-parole des verts en matière de Paix et de Sécurité. « Les efforts diplomatiques doivent faire contrepoids à la présence militaire pour faire en sorte d’éviter au maximum les pertes de vie et les dommages structurels ». Tout ce verbiage représente un appui à peine déguisé à la guerre impérialiste contre la Libye enrobé de «préoccupations humanitaires». La campagne électorale détourne l’attention des prolétaires de leurs intérêts immédiats, mais elle détourne aussi l’attention des interventions impérialistes en cours.

Le parti de la gauche réformiste et petite-bourgeoise au Québec, Québec Solidaire participe pleinement à la campagne contre les Conservateurs. Il dénonce notamment les politiques de droite que ce parti a mis en vigueur et son obsession sécuritaire, commune à tous les gouvernements bourgeois et insiste sur le fait que les orientations du gouvernement Harper iraient à «l’encontre de valeurs largement partagées par la population québécoise : justice sociale, défense de la culture et de la langue française, égalité entre les femmes et les hommes, développement d’un Québec vert, respect des droits humains, solidarité internationale, démocratie» (1). Une phraséologie typiquement petite-bourgeoise et nationaliste qui ne fait aucune mention de la classe ouvrière et de la lutte des classes et qui propage les illusions d’un possible monde «meilleur» sous le joug du capital! Quant à l’obsession sécuritaire des Conservateurs, il est important de rappeler le système des certificats de sécurité qui permettent de mettre en détention sans accusations ni jugement des personnes immigrantes qui n’ont pas la citoyenneté canadienne sous le prétexte de «terrorisme». L’appel à ne pas voter pour le parti Conservateur représente simplement un soutien à une fraction de la classe dominante, considérée comme étant plus «éclairée», contre une autre qui serait plus réactionnaire. Le prolétariat n’a absolument aucun intérêt à se laisser enrôler dans cette campagne qui vise à maintenir intacte la domination de classe de la bourgeoisie.

Des militants d’extrême-gauche, dont les maoïstes du Parti Communiste Révolutionnaire, ont lancé une campagne pour le boycott des élections fédérales de 2011 (2). C’est une campagne démocratique de boycott des élections. Ses promoteurs n’appellent pas les prolétaires à boycotter les élections afin de faire avancer la rupture avec les illusions démocratiques et le retour à la lutte de classe, mais parce que ces élections ne sont pas assez démocratiques ! Ils disent que leur campagne de boycottage leur servira à montrer la nature « non-démocratique » de ces élections et à appeler à la lutte pour une « démocratie populaire » et un « pouvoir populaire » ; apparemment cette lutte consistera à… « commencer la conversation sur comment créer une véritable égalité et une véritable démocratie » ! Puisqu’ils s’efforcent de renforcer les illusions dans la démocratie, il est naturel qu’ils ne parlent pas de la division du « peuple » en classes opposées et qu’ils cachent qu’il ne pourra exister de « véritable égalité » qu’après la révolution, la destruction de l’Etat bourgeois et l’instauration de la dictature du prolétariat, étape indispensable pour démanteler le capitalisme et passer à la société communiste sans classes.

Pour ces élections, comme pour toutes les autres, la seule position qui correspond aux intérêts de classe du prolétariat est l’abstentionnisme révolutionnaire. Ceci correspond aux positions défendues par la Gauche Communiste dès les années vingt (3).

La force du prolétariat, dont l’exploitation fait vivre toute la société bourgeoise, ne réside que dans son action collective, menée et organisée sur des bases de classe. Le terrain électoral, par définition interclassiste, où chaque prolétaire va isolément déposer son bulletin aux côtés des individus de toutes les autres classes, est un terrain truqué qui ne sert que la classe dominante. D’une part parce que celle-ci a mis sur pied et entretient un gigantesque et multiforme appareil (médias, partis, institutions diverses…) anti-prolétarien de propagande et de formation de l’ « opinion publique » ; d’autre part parce que le parlement et tout le système politique démocratique ne sont plus depuis longtemps des centres du pouvoir réel dans la société bourgeoise : leur fonction principale est de dévier le mécontentement dans les méandres des alternances inoffensives entre politiciens bourgeois de droite et de gauche. Pour se défendre contre l’exploitation et la répression, pour lutter contre la politique bourgeoise, pour exprimer sa solidarité avec les prolétaires des autres pays, la classe ouvrière devra abandonner ses illusions démocratiques, légalistes et pacifistes et en venir à l’affrontement ouvert avec la classe exploiteuse. La lutte prolétarienne ne passe pas par le cirque électoral et les institutions démocratiques bourgeoises, elle les combat ! Les prolétaires n’ont rien à gagner à participer aux élections bourgeoises où le capitalisme est toujours le vainqueur ! La seule solution pour le prolétariat au Canada et partout dans le monde c’est la reprise de la lutte de classe pour la défense de ses intérêts exclusifs de classe et ensuite pour le renversement du système capitaliste d’exploitation sous la direction du parti politique de classe.

Non au cirque électoral ! A bas le capitalisme, à bas l’impérialisme !

Pour le retour à la lutte de classe, pour la reconstitution du parti de classe international, pour la révolution communiste internationale !

Parti Communiste International

www.pcint.org

(1) http://www.quebecsolidaire.net/actualite_nationale/elections_federales_au_quebec_c’est_non_aux_conservateurs

(2) www.boycott2011.ca

(3) Voir les Thèses sur le parlementarisme de la Fraction Communiste abstentionniste, dirigée par Amadeo Bordiga : «... dans les pays ou le régime démocratique a depuis longtemps achevé sa formation, il n’existe plus, au contraire, aucune possibilité d’utiliser la tribune parlementaire pour l’oeuvre révolutionnaire des communistes, et la clarté de la propagande non moins que la préparation efficace de la lutte finale pour la dictature exigent que les communistes mènent une agitation pour le boycottage des élections par les ouvriers... La dangereuse conception qui réduit toute action politique à des luttes électorales et à l’activité parlementaire n’a été que trop répandue par la pratique ultra-parlementaire des partis socialistes traditionnels»

http://marxists.org/francais/bordiga/works/1920/06/bordiga_19200627.htm

1- Note des CIK: Les supposés "acquis sociaux gagnés de haute lutte par la classe ouvrière" sont en fait plutôt des transformations économico-politiques, c'est-à-dire une tendance internationale au capitalisme d'État, mis sur pied par des organismes tout à fait bourgeois : les syndicats, les partis staliniens et sociaux-démocrates dans le but de maintenir le capitalisme, que de réels gains pour la classe ouvrière.

2-Note des CIK : Tous les syndicats sont réformistes. Dans le capitalisme en décadence, il ne peut y avoir des syndicats révolutionnaires. Nous considérons les syndicats comme des organismes liés à l’État par mille et un fils, lois, subventions et concertations. Changer les directions syndicales ou essayer de transformer les syndicats est impossible tant leurs liens avec l’État capitaliste sont organiques. Ceci implique le rejet des syndicats rouges ou anarchistes

Les Communistes Internationalistes Klasbatalo (CIK) n'ont aucun lien organisationnel avec le Parti Communiste International et ne partagent pas toutes ses positions politiques.

mardi 5 avril 2011

Brochure d'archive: La question du syndicalisme au Québec

C’est autour d’une lutte perdue par la faute du syndicat que des ouvrières de la chemise, de la fourrure, de la chaussure et des chemins de fer se regroupent pour constituer l’Atelier Ouvrier. Très vite, leur analyse les amène à comprendre que leur défaite est attribuable aux structures mêmes du syndicalisme. Ils produisent alors le texte La question du syndicalisme au Québec.
Ce texte d’archive de 72 pages, publié en décembre 73 par l’Atelier Ouvrier, tout en critiquant les syndicats, analyse point par point les clauses d’une convention collective d’ouvriers de la chaussure. Même si le texte reflète quelques illusions sur les syndicats, par exemple, quand il hésite entre « pousser sur le syndicat » ou créer des comités de luttes indépendants du syndicat ou bien quand il mentionne que La principale raison d’être du syndicalisme… c’est la convention collective. C’est une vision restreinte des syndicats alors que leur véritable rôle est un de sabotage des luttes ouvrières tout en étant des organisations qui travaillent à la préservation du capitalisme. L’AO représentait quand même un écoeurement de prolétaires vis-à-vis du syndicalisme au début des années 70. Le sabotage des luttes du mouvement ouvrier par les syndicats ne date pas d’hier. Le texte montre aussi très bien comment les syndicats sont liés pieds et mains à l’État bourgeois par des lois, subventions et concertations, bref ils font partie de l’État.
Fin décembre 74, l’Atelier Ouvrier disparaît parce qu’il a été phagocyté par l’organisation maoïste En Lutte! Les maoïstes se sont chargés d’orienter ces militants vers la position syndicale stalinienne i.e que ce sont les directions syndicales qu’il faut changer et non pas lutter en dehors des syndicats. Les syndicats n’étant pour eux qu’un instrument pour renforcir le capitalisme d’État.

Les communistes internationalistes Klasbatalo

Extraits de La question du syndicalisme au Québec :
« …Ainsi on peut déjà donner une première définition du syndicalisme que nous complèterons plus loin. Le syndicalisme apparaît d’abord comme la FORME D’ORGANISATION CAPITALISTE DE LA CLASSE OUVRIÈRE. Précisons ces termes.
Le syndicalisme est la forme d’organisation capitaliste de la classe ouvrière. C’est-à-dire est le mode regroupement des ouvriers qui tentent de défendre leurs intérêts économiques – salaires et conditions de travail – contre les patrons. Mais cette façon de s’organiser est dite capitaliste parce qu’elle correspond à la naissance et au développement du capitalisme, autour du 19e siècle. Avant, les ouvriers étaient organisés autrement parce que les patrons du temps régnaient de façon différente et que les conditions de travail et de production étaient aussi différentes.
Cette façon de s’organiser est dite capitaliste aussi parce qu’elle obéit, à peu de choses près, aux mêmes règles de fonctionnement que celle régnant dans l’entreprise capitaliste.
Cette dernière affirmation a deux sens. D’abord elle signifie comme nous le disions plus haut, que le syndicalisme est développé parallèlement au capitalisme. Ensuite, elle signifie que dans ses structures, son organisation interne, ses RÈGLES DE FONCTIONNENT, sa hiérarchie, le syndicalisme fonctionne à peu près comme l’entreprise capitaliste.
C’est-à-dire que dans le syndicalisme, il y a la BASE et le SOMMET. Le sommet décide pour la base qui n’a pas grand chose à dire. En un mot, il y a des BOSS dans le syndicalisme comme dans l’entreprise. De plus, même si initialement le syndicalisme a été construit pour défendre les intérêts des travailleurs, aujourd’hui il semble plus souvent qu’autrement que ce sont les travailleurs qui sont faits pour financer le syndicalisme. En effet, le syndicalisme n’a plus son ardeur des débuts.
Pourquoi? Parce qu’il est devenu une INSTITUTION RESPECTABLE DU SYSTÈME ÉTABLI. Parce que le système actuel a passé des lois qui régissent le fonctionnement du syndicalisme, des luttes ouvrières, des griefs, de la négociation, etc… Ces LOIS LIMITENT l’action du syndicalisme et par là EMBRIGADENT la classe ouvrière dans un CARCAN JURIDIQUE qui lui lie les pieds et les mains.
La troisième raison pour laquelle le syndicalisme est dit la forme d’organisation capitaliste de la classe ouvrière réside précisément dans ce dernier point. À cause des nombreuses LOIS RÉGISSANT la pratique syndicale, le syndicalisme est obligé d’entretenir des relations avec l’ÉTAT, plus particulièrement avec le MINISTÈRE DU TRAVAIL.
Ainsi le syndicalisme est-il toujours en situation de DÉPENDANCE vis-à-vis des pouvoirs publiques. Une des preuves en est donnée par les multiples rapports que les centrales syndicales envoient au gouvernement pour que celui-ci n’agisse pas de façon trop défavorable à la population.
Mais cette intervention de l’ÉTAT dans le domaine des relations de travail a eu un effet crucial sur le syndicalisme. En effet au début du 19e siècle on ne faisait pas de distinction – à juste titre d’ailleurs – entre la lutte économique des travailleurs et les combats politiques qu’ils menaient pour s’affranchir des patrons.
Les luttes économiques sur les conditions de travail et de salaires n’étaient pas aussi séparées au plan de L’ORGANISATION DES TRAVAILLEURS des luttes politiques qu’aujourd’hui. Or depuis plus de cent ans les interventions de l’État dans le domaine des relations de travail ont délimité les règles de la pratique syndicale, son champ d’action, etc… Parallèlement le syndicalisme surtout nord-américain, se perfectionnait dans la négociation collective et laissait à d’autres le soin de mener les actions politiques. C’est de là que date la séparation entre lutte économique et combat politique. Or pour la classe ouvrière, lutte économique et combat politique devraient être une seule et même chose. L’un impliquant l’autre… »
« …Qu’est-ce qu’une convention collective? C’est un contrat de travail qui lie le patron et le syndicat. C’est-à-dire que les deux parties s’entendent sur les conditions de la vente du travail des ouvriers.
Il y a donc des ouvriers qui sur le marché du travail offrent leur capacité de travail. Sur le même marché, s’amènent les patrons qui ont besoin de la FORCE DE TRAVAIL des ouvriers.
Le syndicat est l’intermédiaire par lequel l’achat et la vente de la force de travail des ouvriers se règlent. Le syndicat est le COMMERÇANT EN GROS d’une marchandise qui s’appelle la force de travail et qui concrètement est constituée par des hommes et des femmes qui doivent travailler pour gagner leur vie.
Mais pour qu’il y ait contrat entre le patron et le syndicat, il faut que les deux parties se reconnaissent légalement l’une et l’autre. Or, cette reconnaissance légale entre le syndicat et le patron IMPLIQUE la reconnaissance de toute une série de POSITIONS SOCIALES et de RAPPORTS DE FORCE.
Cette reconnaissance légale des deux parties dans et par la convention implique qu’il y ait des travailleurs c’est-à-dire des hommes et des femmes qui doivent nécessairement vendre leur capacité de travail à des patrons. VENDRE leur FORCE DE TRAVAIL parce qu’ils ne peuvent pas vendre autres choses. Vendre parce qu’ils ne peuvent pas faire autre chose. VENDRE parce qu’ils sont une MARCHANDISE. Vendre parce qu’ils sont FORCES DE VENDRE LEUR FORCE DE TRAVAIL.
Cette reconnaissance légale des deux parties implique aussi qu’ils y ait des patrons qui ACHETENT la FORCE DE TRAVAIL des ouvriers. C’est-à-dire qu’il y ait des hommes qui achètent la capacité de production d’autres hommes. Des hommes capables d’acheter la capacité de production des autres parce qu’ils ont l’argent pour le faire. Des hommes qui n’ont pas besoin de travailler pour vivre. Des hommes qui n’ont pas besoin de se vendre à d’autres pour vivre.
Donc, à la base de la reconnaissance juridique des deux parties (patrons-syndicats) il y a une INEGALITE SOCIALE fondamentale des hommes entre eux.
A cela s’ajoute un autre fait qui accentue cette inégalité. Il s’agit de la présence même du syndicat. En effet, par la convention, la vente et l’achat de la force de travail des ouvriers ne se fait pas directement, face à face. Elles s’opèrent par le syndicat. C’est lui qui tente d’influer le patron.
Evidemment cela implique que dans beaucoup de cas, le syndicat accepte qu’il y ait des hommes obligés de se vendre comme une marchandise pour vivre et d’autres hommes qui n’ont pas besoin de travailler pour vivre.
Mais à cause de toutes les raisons mentionnées plus haut, le syndicat n’a pas toujours un rôle positif et avantageux pour les travailleurs. De par les lois qui régissent la vente et l’achat de la force de travail (Code du travail) le syndicat se voit souvent forcé d’obliger les travailleurs à accepter une convention qui ne les avantage pas tellement. Souvent même le syndicat ne veut absolument pas défendre les travailleurs, plus intéressé qu’il est à retirer les cotisations qu’à mener le combat rondement. Ou encore, dans les cas de syndicats de boutique, le syndicat est à la solde du patron et trahit effrontément les travailleurs en les vendant au boss pour rien.
Il en découle donc que même la vente de la capacité de production des travailleurs échappe au contrôle des ouvriers. C’est-à-dire qu’ils n’ont pas la liberté de marchander eux-mêmes avec le patron.
Ainsi le syndicat en défendant mal les travailleurs, en acceptant de les louer à bas prix, en ne les informant pas de leurs mauvaises conditions de travail, en leur cachant des clauses qui leur font perdre des droits acquis etc…renforcit l’inégalité fondamentale entre les ouvriers et les patrons entre la CLASSE OUVRIERE et la CLASSE BOURGEOISE.
À partir de ce moment, le syndicat qui dans ses premières années de lutte pouvait être un instrument valable de défense[1] se transforme ici en un AGENT des capitalistes pour leur faciliter l’achat de la force de travail des ouvriers.
L’analyse de toute convention montre facilement que cette CONNIVENCE et cette COLLABORATION patron-syndicat sur le dos des travailleurs.
L’analyse de toute convention montre facilement aussi jusqu’à quel point les travailleurs se trouvent liés pieds et mains à des règlements, lois, conditions de travail qu’ils ne souhaitent absolument pas mais dont l’habileté de quelques beaux parleurs syndicalistes leur ont fait accepter.
L’analyse de toute convention montre facilement enfin que le syndicat enlève tout droit de regard aux ouvriers sur leur propre convention. En effet, les deux parties concernées par la convention ne sont pas le patron d’une part et les ouvriers d’autre part. Les parties signataires et responsables de l’application et de la juridiction de la convention sont le patron et le syndicat. Mais parce que le syndicat la signe en notre nom, nous sommes pognés avec.
Le syndicat est pogné dans un carcan de lois et à son tour il veut nous pogner dans ces mêmes lois pour perpétuer notre exploitation. »

Nous pouvons vous envoyer la brochure par téléchargement.
S’adresser à cim_icm@yahoo.com 

[1] Notes des Communistes Internationalistes Klasbatalo
Cela était vrai au 19ième siècle avant la période impérialisme du capitalisme mais par après les syndicats sont devenus de plus en plus intégrés à l’État bourgeois et de fervents défenseurs du capitalisme.

mardi 1 mars 2011

La "grève de masse" aujourd'hui et demain

Nous publions cet article du Bulletin #4 de la Fraction de la Gauche Communiste Internationale. Il est sûr et certain que les médias bourgeois ne diront jamais la vérité sur ce qui se passe au Moyen-Orient et ailleurs. Ainsi des dizaines de milliers de travailleurs (75 000)ont manifesté au Wisconsin et le gouverneur Walker a menacé d’avoir recours à la garde nationale si la résistance se poursuivait étant donné que les syndicats avaient accepté des coupures qui n’étaient pas suffisantes. Partout dans le monde, la bourgeoisie impose sa dictature que ce soit par la répression sanglante ou par sa démocratie. L’article ci-dessous montre la voie à suivre pour le prolétariat de la planète et ses minorités révolutionnaires comme celle des groupes et militants de la Gauche communiste.

Les communistes internationalistes Klasbatalo

Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution" (Rosa Luxemburg, Grève de masse, parti et syndicat, 1906).

La situation mondiale actuelle illustre l'analyse que faisait Rosa Luxemburg sur "La grève de masse" dans la période de la révolution Russe de 1905. Évidemment, nous ne sommes pas aux portes de la révolution. Mais les luttes prolétariennes se multiplient un peu partout dans le monde, que ce soit dans des pays du "centre" ou de la "périphérie" du capitalisme, et prennent des formes multiples : ce sont soit des grèves isolées ou de secteur complet de l'économie, soit des grèves générales qui affectent une ville ou un pays entier ; ce sont soit des grèves spontanées (sans préavis syndical) dites "sauvages" ou des grèves de longue durée que les grandes centrales syndicales ont de plus en plus de mal à contrôler ; ce sont soit des manifestations de la jeunesse prolétarienne étudiante dont les perspectives d'avenir s'effondrent ou des manifestations de travailleurs du secteur public et des grandes industries qui voient leurs conditions de vie s'étioler. En plus d'une occasion, les luttes de résistance "économique" se transforment en luttes "politiques" contre le gouvernement ou bien, au moins, contre les figures les plus représentatives des intérêts du capital (même si, évidemment, ces luttes politiques sont encore reprises, contrôlées et dirigées par les forces de "gauche" du capital lui-même)... Ce sont en outre des luttes qui se développent chaque fois plus de manière simultanée, qui portent en elles une forte tendance à s'étendre, à chercher la solidarité et ainsi à devenir chaque fois plus décidées et combatives (1).Or les conditions qui ont créé ce climat de luttes ne sont pas temporaires : la poursuite de la chute du capitalisme dans la pire crise de son histoire nous permet de prévoir une longue durée, de plusieurs années, de cette tendance à la montée de la lutte de classe du prolétariat, une véritable "grève de masse" internationale.

Bien sûr, toutes les luttes du prolétariat se confrontent dans chaque pays et de plus en plus durement aux différents obstacles mis en place par l'État capitaliste ; en premier lieu les syndicats. Pour le moment, la majorité des grèves et des journées de lutte, dans des pays comme la France et l'Espagne, sont organisées par les grands centrales syndicales de manière à défouler le mécontentement croissant des travailleurs et, en même temps, à l'enfermer dans un cadre qui ne permet pas réellement de stopper les attaques du capital contre leurs conditions de vie. Cependant, ces journées n'en sont pas moins une expression de la montée du mécontentement et de la combativité des prolétaires et de la nécessité pour la bourgeoisie d'anticiper sur les explosions spontanées et hors de son contrôle. De plus, le prolétariat commence à se reconnaître comme classe, à ressentir la nécessité de dépasser les barrières corporatistes dans lesquelles les syndicats l'enferment, à chercher la solidarité et à se rendre compte de la nécessité de prendre le contrôle de ses luttes en dehors des syndicats.

Viennent ensuite les partis politiques du capital, notamment les partis et autres organisations de la "gauche du capital". Comme on l'a vu en Grèce depuis le début de l'année passée, et comme nous le voyons maintenant en Tunisie et en Égypte, la colère du prolétariat (et des autres classes exploitées) peut éclater à tout moment, dans tout pays ; il suffit d'une pincée supplémentaire d'injustice (l'assassinat d'un jeune aux mains de la police, de l'augmentation des prix des produits de première nécessité...) pour qu'elle débouche sur une situation de manifestations spontanées et de révolte généralisée qui mènent à des affrontements ouverts avec les forces de répression de l'État. Apparaît alors dans toute sa cruauté et toute son ampleur le véritable rôle des partis "de gauche" de la bourgeoisie, comme les "sociauxdémocrates", les "démocrates de gauche" ou les staliniens de toutes sortes. Leur rôle est, à travers un "changement" de dirigeants, de redonner du crédit à l'État capitaliste en entretenant, chez les prolétaires, l'illusion nuisible qu'il existe "des issues à la crise du capitalisme" et "des solutions à leurs problèmes". Cependant, si de nombreux ouvriers conservent encore des illusions sur les partis de gauche du capital, les agissements de ces derniers – qui apparaissent de plus en plus ouvertement en faveur des intérêts du capital et contre les travailleurs - portent en eux un processus d'usure de leur image, de prise de conscience dans la classe ouvrière que ce sont des forces ennemies.

Les luttes prolétariennes se confrontent aussi, bien sûr, de plus en plus directement aux forces de répression, sans cesse renforcées, de l'État capitaliste - l'appareil judiciaire, la police, l'armée. Au Mexique, le licenciement de 40 000 ouvriers du secteur électrique, à la fin 2009, fut précédé par l'occupation brutale des lieux de travail par la police fédérale anti-émeutes ; dans l'Espagne "démocratique" du socialiste Zapatero, la grève "sauvage" des contrôleurs aériens de décembre 2010 a été brisée par la prise en main des aéroports par l'armée. De plus en plus, les manifestations ouvrières se terminent en affrontements avec la police (Grèce, Grande-Bretagne, Inde, Bangladesh, Tunisie, Algérie, Égypte...) qui, loin de ce que les médias bourgeois nous assènent, sont chaque fois moins le produit "d'actions directes" de "petits groupes radicaux" et de plus en plus le fait de la police anti-émeute. En fin de compte, cet aspect est aussi un indice clair de l'aiguisement du conflit entre les deux classes antagoniques de la société : d'une part, c'est le redoublement des attaques féroces de la classe capitaliste contre les conditions de vie et de travail des prolétaires ainsi que la préparation de cette classe et de son État pour affronter la résistance des exploités ; et d'autre part, se manifestent, de manière plus déterminée et plus large, les efforts de la classe ouvrière pour résister et s'engager dans le combat contre le capital.

Finalement, toute cette ambiance de lutte de classes croissante est méthodiquement et sciemment défigurée par les médias du capital, presse, radio, télé, sans oublier internet. Jamais n'ont existé autant de moyens d'information qu'aujourd'hui... mais en même temps jamais la classe dominante n'a utilisé comme aujourd'hui ces moyens pour empêcher que le prolétariat acquiert une idée claire des enjeux actuels, pour empêcher que chaque travailleur se rende compte que, partout, ses frères de classe se lèvent et luttent exactement pour les mêmes raisons que celles pour lesquelles il est lui-même indigné (le chômage, les attaques directes ou indirectes au travail, les conditions de vie de plus en plus dégradées pour sa famille, l'exploitation et l'oppression croissantes), pour empêcher qu'on se reconnaisse dans ces luttes et que celles-ci continuent à se propager sur tous les continents, en somme pour empêcher que les prolétaires se reconnaissent comme classe avec les mêmes intérêts et les mêmes buts : lutter contre l'exploitation capitaliste.

En premier lieu, il y a la plus grande censure possible - tant à échelle nationale que mondiale - sur les luttes prolétariennes. Par exemple, tout le monde a été mis au courant, jusqu'à la nausée, de l'attentat aux États-Unis, à Phoenix, contre la représentante démocrate au Congrès américain. Mais, à l'exception des lecteurs de la presse militante, combien d'ouvriers ont été au courant des grèves aux États-Unis de l'année passée qui ont vu la participation de milliers de prolétaires de différents secteurs ? Ensuite, si on ne peut plus les cacher complètement du fait de leur ampleur, les médias bourgeois dénaturent de mille manières les luttes de classe en les présentant comme des situations essentiellement "locales" ou "nationales", ou comme des "réactions égoïstes et irresponsables qui s'opposent aux ajustements que le capital juge nécessaires et profitables à l'ensemble de la population" ("réductions des dépenses d'Etat" ou "assainissement des entreprises" qui, soi-disant, rendent indispensables la baisse des salaires, les licenciements massifs ou la réduction des retraites) ; ou bien en les présentant comme des actions de "petits groupes extrémistes" ou comme des réponses à des gouvernements "corrompus" qu'il suffit de changer pour ramener le calme. Le comble du cynisme est l'affirmation fréquente selon laquelle les ouvriers en lutte sont des "privilégiés" qui, "égoïstement", prétendent conserver leurs conditions de vie au détriment du reste de la population !

Les conditions sont réunies pour que la lutte des classes continuent à se développer

Dans cette situation où les médias essaient par tous les moyens de cacher ou de minimiser les luttes, ou de noyer le fait que celles-ci obéissent aux mêmes causes fondamentales, ce qui rend plus difficile la prise de conscience des ouvriers qu'ils ont des intérêts et des objectifs communs, le surgissement simultané de larges mouvements de lutte sur tous les continents devient encore plus significatif.

Deux faits d'importance historique sont à la base de cette situation. Premièrement, les attaques généralisées et chaque fois plus brutales et directes contre les conditions de vie et de travail que le prolétariat et les autres classes exploitées subissent de la part de la classe capitaliste du fait de l'enfoncement inexorable du système capitaliste dans la pire chute dans la crise économique de son histoire. Il est de plus en plus évident que tous les efforts de la bourgeoisie de tous les pays et de tous les secteurs pour "se sauver" ou "se remettre" de la crise, ont justement pour fondement d'exploiter, jusqu'à la dernière goutte, la force de travail, et cela par tous les moyens indirects et directs qu'elle a à sa disposition. Par exemple, le "transfert de fonds" de l'État - à commencer par celui de la première puissance mondiale - pour "sauver" les grandes banques et les grandes industries consiste, de fait, à faire payer ce "sauvetage" par les travailleurs via l'explosion du chômage, des augmentations d'impôts et la réduction du salaire direct et indirect (c'est-à-dire le budget de l'État dans la santé, l'éducation et autres services). Et cela arrive dans tous les pays du monde, tant dans les plus grandes puissances capitalistes que dans les pays les plus petits et faibles. C'est cette charge généralisée du capital contre le prolétariat qui est à la base du surgissement simultané d'une multitude de foyers de lutte de résistance au niveau mondial.

En outre, il est de plus en plus évident que la supposée "sortie de la récession" de 2010 se révèle clairement pour ce qu'elle est : un mensonge et, pour le moins, une illusion. Pour tenter de justifier cela, les médias bourgeois cherchent à faire croire que c'est la faute au ralentissement de la "reprise" aux États-Unis, ou que c'est la responsabilité de plusieurs pays d'Europe dont les finances publiques s'effondrent. Selon l'aire économique ou le pays où ils se trouvent, les médias alertent contre les "risques" croissants d'une nouvelle et prochaine "rechute économique" dont la cause serait "l'irresponsabilité" du pays d'en face. Derrière cette guerre médiatique, on trouve l'aiguisement de la guerre commerciale et financière entre les différents "blocs" de bourgeoisies nationales (en premier lieu, bien que pas seulement, autour des États-Unis et de la Grande-Bretagne contre l'Euro-zone).

Mais en plus, à cette "roulette russe" à laquelle se livrent les forces capitalistes mondiales se rajoute aujourd'hui un élément supplémentaire d'aggravation de la crise : l'inflation. Nous allons assister, dans les prochains mois, à une période d'augmentation généralisée des prix, à commencer par les prix de l'énergie et les produits de première nécessité ; c'est déjà ce qui a été l'étincelle qui a déclenché plusieurs des révoltes récentes (Tunisie, Algérie, Égypte, Chili...).

En somme, l'aiguisement de la crise et, avec elle, celle des conditions matérielles font que continuent à se multiplier les luttes de résistance des exploités, lesquelles tendent non seulement à se maintenir mais aussi à devenir chaque fois plus larges et profondes.

Il y a un deuxième fait, lui aussi d'importance historique, qui se manifeste, à l'échelle internationale et sur une période prolongée, dans ce que Rosa Luxemburg a appelé la "grève de masses" ; c'est ce que l'on perçoit aujourd'hui dans la volonté de se défendre et l'inclination à la lutte au sein du prolétariat; c'est-à-dire, l'existence à la fois des facteurs "objectifs" et des facteurs "subjectifs" favorables à l'élargissement et à l'approfondissement du combat prolétarien contre le capitalisme.

D'une part, on peut apprécier l'apparition d'un penchant à la "contagion", c'est-à-dire à l'apparition d'une tendance à l'extension internationale des luttes. A partir des luttes en France, les travailleurs d'autres pays d'Europe (Grande-Bretagne, Espagne, Italie, Belgique...) se sont aussi lancés dans la bataille en sachant que les attaques ducapital sont du même type partout. Plus récemment, le mouvement social qui a embrasé la Tunisie durant un mois a servi d'exemple et de détonateur auxmanifestations massives qui ont secouées les autres pays du Maghreb, et cela pour les mêmes raisons : l'augmentation des prix des biens de première nécessité. En même temps, et de nouveau malgré les obstacles que met en avant la bourgeoisie - en particulier, le contrôle syndical dont une des tâches est de maintenir les revendications et les luttes ouvrières divisées -, on voit également, dans les luttes, des débuts d'expressions de solidarité entre travailleurs de différents secteurs (même au niveau international), ce qui signifie que la base pour une future unification des revendications et des objectifs des luttes existe.

Ce qui est tout aussi remarquable dans les luttes actuelles, c'est que la colère et la combativité ne cessent de croitre. L'action des forces policières de l'État capitaliste, dont l'objectif est de "dissuader", c'est-à-dire de terroriser et de réprimer les luttes, s'est transformée, dans différentes occasions, en son contraire : un stimulant poussant les ouvriers à sortir dans la rue afin de protester massivement contre les gouvernements. La situation exceptionnelle des révoltes violentes et massives en Grèce, il y a plus d'un an, tend maintenant à se reproduire dans différents pays : la Grande-Bretagne, la Tunisie, l'Inde, l'Égypte...

Il faut aussi relever l'existence d'une tendance à la "politisation" des luttes dans le sens où les manifestations face à l'aggravation des conditions économiques laissent chaque fois plus la place à des contestations ouvertes contre l'État et ses plus éminentes représentations. De façon évidente, cette "politisation" est pour le moment récupérée et mise à profit par les partis bourgeois "d'opposition" eux-mêmes. Elle n'en exprime pas moins, cependant, une tendance, chez les prolétaires, à prendre conscience que la réponse à apporter à l'aggravation de leurs conditions de vie ne se trouve plus simplement au niveau de l'entreprise ou de la corporation, c'est-à-dire au niveau local et "économique", mais qu'elle doit être plus "générale", "globale" et donc aussi "politique".

Finalement, il faut souligner le fait qu'avec les mouvements de lutte s'accélère aussi le surgissement de minorités de prolétaires d'avant-garde qui cherchent à aller au-delà des luttes immédiates, qui s'interrogent sur les causes des défaites, qui cherchent à se réunir et à s'organiser pour préparer, dans les meilleures conditions, les luttes de demain, à faire qu'elles ne soient pas déviées ou récupérées par les forces du capital et qu'elles aillent dans le sens du "véritable changement" qu'est la mise à bas du capitalisme ; en somme, des minorités en recherche d'une alternative et d'un engagement révolutionnaire. Par exemple, la défaite des mobilisations en France contre la réforme des retraites a laissé une multitude de petites "assemblées" de travailleurs où les éléments de ce type, avec des militants de diverses organisations politiques, discutent sur les perspectives d'organisation et de lutte. Une ambiance similaire existe ailleurs. Cela se reflète dans l'augmentation de correspondance, de discussion et de contacts des groupes révolutionnaires.

C'est en regroupant leurs forces que les communistes pourront jouer pleinement leur rôle dans la classe

Toute cette situation ouverte, que nous définissons comme urgente l'intervention des minorités révolutionnaires au sein de leur classe, notamment celle des groupes et militants de la Gauche communiste.

Bien sûr, un aspect des campagnes idéologiques de la bourgeoisie contre les prolétaires (auxquelles participent même des groupes qui s'auto-proclament "révolutionnaires" comme les anarchistes par exemple), est de semer la méfiance des ouvriers envers les groupes politiques véritablement révolutionnaires et communistes afin qu'ils apparaissent comme "extérieurs", "étrangers" et même "dangereux" aux yeux de la classe ouvrière. C'est la raison pour laquelle nous ne cessons d'insister sur le fait que les groupes révolutionnaires, notamment ceux de la Gauche communiste, sont, au contraire, une partie de la classe elle-même, celle qui est "la plus consciente et la plus déterminée" ; qu'ils sont simplement - comme le dit le Manifeste communiste de 1847 - ceux qui "mettent en avant et font valoir les intérêts indépendants de la nationalité et communs à tout le prolétariat" ; ils sont "la fraction la plus résolue des partis ouvriers de tous les pays, la fraction qui stimule toutes les autres; théoriquement, ils ont sur le reste du prolétariat l'avantage d'une intelligence claire des conditions, de la marche et des fins générales du mouvement prolétarien" ; et leurs objectifs sont : "constitution des prolétaires en classe, renversement de la domination bourgeoise, conquête du pouvoir politique par le prolétariat".

Dans ce sens, il est d'abord indispensable que, dans cette période, les minorités révolutionnaires mettent en avant les intérêts communs de classe qui résident dans les luttes qui surgissent partout. Leur tâche n'est pas seulement de "diffuser l'information" ni non plus d'appeler simplement à la lutte, mais avant tout d'impulser les tendances vers l'extension et l'unification des luttes au-delà de toute division sectorielle ou nationale qu'essaie d'imposer la bourgeoisie. Il s'agit de souligner leur essence commune comme parties d'un mouvement de l'ensemble de la classe ouvrière, d'un mouvement dont les causes et les buts historiques - de l'État capitaliste et la prise du pouvoir par le prolétariat à l'échelle internationale - sont les mêmes. En même temps, il est indispensable que les révolutionnaires assument leur tâche de transmission de l'héritage des expériences de luttes du passé qui est entre leurs mains tout comme la théorie révolutionnaire – le marxisme -, de telle manière que les prolétaires puissent en bénéficier dans leurs combats actuels. De cette manière, non seulement les révolutionnaires contribuent à augmenter la capacité de l'ensemble du prolétariat à se défaire des mystifications et des pièges que la bourgeoisie lui tend à chacune de ses luttes mais surtout ils contribuent de manière décisive à la prise de conscience de classe du prolétariat de ses intérêts et objectifs révolutionnaires et de la nécessité et possibilité de les réaliser.

Finalement, les révolutionnaires ont aussi la tâche impérieuse de transmettre toute l'expérience de la classe accumulée en matière d'organisation et spécialement celle qui découle de la période révolutionnaire du début du 20ème siècle ; expérience qui a mené au triomphe de la révolution prolétarienne en Russie et à la vaguerévolutionnaire internationale qui a fissuré l'édifice capitaliste et a menacé de le mettre à bas pour toujours.

Aujourd'hui et encore plus demain, le surgissement de prolétaires d'avant-garde en recherche d'une cohérence, d'un engagement militant et d'une organisation révolutionnaire, impose en particulier aux groupes et éléments actuels de la Gauche communiste la responsabilité majeure de débroussailler le chemin qui conduit à la construction du nouveau parti communiste mondial. Et sur ce chemin, les forces communistes actuelles se doivent d'abord de dépasser la dispersion politique et organisationnelle qui les caractérise et s'engager résolument, dès aujourd'hui, dans un processus de rapprochement et de "regroupement". Elles doivent passer par là si elles veulent être à la hauteur de la situation et assumer les responsabilités pour lesquelles le prolétariat les a faites surgir.

Janvier 2011

FRACTION DE LA GAUCHE COMMUNISTE INTERNATIONALE

Site web : http://fractioncommuniste.org/

Courriel : inter1925@yahoo.fr

1. La liste est longue, à commencer par les principaux pays européens, des combats ouvriers qui se sont développés ces deux dernières années et leur nombre ne fait que croître sur tous les continents avec l'impasse économique du capitalisme. Pour un suivi plus précis des luttesouvrières dans le monde, nous renvoyons nos lecteurs aux presses internationales de la Tendance communiste internationaliste et du CCI.